La séance de clôture du Saint concile épiscopal de l’Église orthodoxe russe a eu lieu le 2 décembre 2017, à la Salle des conciles de l’église du Christ Sauveur de Moscou.

Les primats et les représentants des Églises orthodoxes locales, venus participer aux célébrations du centenaire de la restauration du Patriarcat dans l’Église russe, ainsi que les membres du Concile et de nombreux clercs moscovites, prenaient part à la séance, présidée par Sa Sainteté le patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie.

S’adressant à l’assemblée le patriarche Cyrille a souligné que la dernière séance du Concile épiscopal de l’Église orthodoxe russe prenait une dimension solennelle, dans la mesure où elle était consacrée à un évènement historique, le centenaire de la restauration du Patriarcat dans l’Eglise orthodoxe russe. « Cet évènement a eu lieu au moment peut-être le plus difficile de notre histoire nationale, lorsque la révolution a tout brisé, au moment où tant de forces, à l’intérieur comme à l’extérieur, s’étaient dressées contre l’Église de Dieu et que des persécutions sanglantes étaient déjà dirigées contre elle. Les premières victimes, parmi les ministres du culte, dont l’archiprêtre Ioann Kotchourov, à Tsarskoe Selo fut le tout premier, sont tombées avant l’élection de Sa Sainteté le patriarche Tikhon. C’est pourquoi saint Tikhon avait parfaitement conscience du sort qui l’attendait lorsqu’il apprit son élection au siège patriarcal. Nous savons que les pressentiments du saint se sont avérés justifiés. Les sept brèves années de son patriarcat ont été des années de confession de la foi. Non seulement parce qu’il risquait chaque jour sa vie, ni parce qu’il a été emprisonné, mais aussi parce qu’il recevait chaque jour de nouvelles informations sur les sauvageries dont étaient victimes les hiérarques et les clercs de l’Église orthodoxe russe, parce qu’il apprenait que des laïcs en étaient aussi victimes. Il apprenait qu’on détruisait les églises et les monastères, qu’on détruisait un millénaire de tradition orthodoxe. Il apprenait que les autorités, luttant contre l’Église, ne lui causaient pas seulement du tort de l’extérieur, mais tentaient de détruire son unité de l’intérieur en initiant un schisme. »

Comme l’a remarqué le primat de l’Église orthodoxe russe, le saint patriarche Tikhon n’a pas vécu assez pour voir l’Église retrouver une certaine liberté dans l’exercice de son ministère. « Il n’a pas vu non plus la gloire de notre Église, la renaissance spirituelle de notre peuple, mais nous savons que, depuis les cieux, saint Tikhon voit tout et, ayant été canonisé, qu’il prie pour notre Église et pour tout le peuple » a souligné Sa Sainteté.

Le patriarche a ensuite remercié les primats des Églises orthodoxes locales et les représentants de celles dont les chefs n’ont pu, pour des raisons objectives, venir à Moscou, de leur participation au Concile épiscopal de l’Église orthodoxe russe et aux célébrations jubilaires. « Certaines des Églises, représentées ici par leurs primats, passent aujourd’hui par de terribles épreuves, faisant des victimes… Nous prions pour que le Seigneur garde toutes nos Églises dans l’unité, afin que, malgré les circonstances extérieures très difficiles, parfois contradictoires, l’ensemble de l’Église garde conscience de la nécessité de veiller à l’unité de l’Église comme à la prunelle de nos yeux. Notre force est dans notre unité, par l’unité nous manifestons notre solidarité avec tous ceux qui souffrent dans l’unique Corps du Christ. »

Le métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou, a donné lecture de la lettre de Sa Sainteté le patriarche Bartholomée de Constantinople au primat de l’Église orthodoxe russe.

Remerciant S. S. le patriarche Cyrille de son invitation à participer à Moscou aux cérémonies du centenaire de la convocation du Concile local qui rétablit, notamment, le Patriarcat dans l’Église russe, supprimé deux cents ans plus tôt par l’état, le primat de l’Église de Constantinople exprime son regret de ne pas avoir pu se rendre aux célébrations. « Cela ne signifie pas pour autant que l’Église mère de Constantinople, cessera un jour de prier pour la prospérité et le succès en Dieu de votre Sainte Église sous la conduite de son patriarche, actuellement Votre chère Béatitude, à laquelle nous souhaitons un long ministère primatial béni en tout. Nous vous prions de transmettre à Leurs Éminences et à Leurs Excellences vos confrères les hiérarques la salutation et la bénédiction de notre Église-mère, qui les étreint avec des sentiments de respect et d’amour, priant pour le succès constant de leur ministère épiscopal dévoué pour la gloire de Dieu », est-il dit dans le message.

« J’exprime ma gratitude à Sa Sainteté pour son aimable message. Je profite de l’occasion pour lui exprimer mes vœux de force et de bonne santé, que Dieu l’aide à conduire l’Église constantinopolitaine, à poursuivre ce service particulier de coopération avec toutes les autres Églises orthodoxes qu’accomplit actuellement dignement Sa Sainteté le patriarche Bartholomée » a dit le patriarche Cyrille après la lecture du message.

« J’éprouve une joie indicible à être venu ici en tant que pape et patriarche d’Alexandrie, à l’invitation de la respectable Église orthodoxe russe, notre sœur, pour participer aux festivités du jubilé solennelle de la restauration du Patriarcat de Moscou, de toute la Russie et des pays du nord, a souligné le primat de l’Église orthodoxe d’Alexandrie.

Comme l’a remarqué Sa Béatitude, la restauration du siège patriarcal de Moscou est l’évènement le plus important après sa fondation. « L’Église russe a prévu que la restauration de la dignité patriarcale sous le nouveau régime serait le garant de la renaissance du peuple russe et de la sauvegarde de la foi. Malgré les multiples afflictions et toutes les souffrances, elle n’a pas reculé, mais n’a fait que s’affermir de la lumière de nouveaux athlètes de la foi et de la piété. L’affliction de l’Église russe a été adoucie par la restauration du Patriarcat. L’’Eglise russe a été couronnée de multiples martyrs, le saint patriarche Tikhon à leur tête. Elle n’a jamais perdu le lien avec le peuple, mais l’a toujours soutenu et est passée avec lui par les dangers et les épreuves » a dit Sa Béatitude le pape et patriarche Théodore II d’Alexandrie.

A l’occasion du jubilé, Sa Béatitude a offert l’omophore dans lequel le saint patriarche Mélèce Pigas signa l’Acte conciliaire accordant à l’Église russe la dignité patriarcale.

Le patriarche Cyrille a remercié Sa Béatitude, en son nom et en celui de l’épiscopat, du clergé et du peuple de l’Église russe, précisant que cette relique historique serait conservée au musée de l’église du Christ Sauveur « en souvenir de cet évènement historique et de votre grand amour pour l’Eglise orthodoxe russe. »

« Antioche, l’Église dans laquelle les disciples du Christ ont été appelés chrétiens pour la première fois, salue la Sainte Russie en ce jour béni où nous fêtons le centenaire du Concile local de Moscou, qui rendit sa dignité patriarcale à l’Église russe et rétablit la conciliarité de cette Église après une interruption de deux cents ans, s’est exprimé le primat de l’Église d’Antioche, Sa Béatitude le patriarche Jean X. L’Église d’Antioche partage aujourd’hui la joie de sa sœur l’Église russe et implore l’intercession de saint Tikhon le confesseur, qui, par la grâce du Saint Esprit, fut élu patriarche par les membres du Concile local, pour diriger l’Église et la conduire à une époque d’athéisme et de persécutions. Notre Église n’oubliera pas le soutien qu’accorda l’Église russe au début du siècle précédent aux enfants de l’Église d’Antioche en les aidant à demeurer sur leurs terres et en leur gratuitement aux pauvres la possibilité de s’instruire et de se soigner. Nous nous souvenons aussi avec une immense reconnaissance de la participation de l’Église à la construction d’églises et de diverses institutions. Nous révérons avec une reconnaissance et un respect particulier le souvenir du rôle de saint Tikhon dans la création du diocèse antiochien en Amérique. Il ordonna le premier métropolite de l’Église d’Antioche sur le sol américain, l’évêque Raphaël de Brooklyn, qui avait fait ses études à Constantinople et en Russie et fut l’archipasteur des antiochiens orthodoxes sur de langue arabe sur le continent américain. »

Le primat de l’Église orthodoxe d’Antioche a aussi mentionné la difficile situation du peuple syrien. « Alors que le terrorisme recule grâce à l’intervention des militaires russes, et qu’il devient possible d’envisager une solution pacifique, nous devons faire notre possible, en tant qu’Église orthodoxe, pour préserver l’unité de la Syrie, pour assurer le retour des chrétiens syriens sur leur terre, pour restaurer les églises et les monastères détruits, pour garantir le retour à une vie normale par des emplois, une alimentation équilibrée, des services médicaux et la possibilité de faire des études pour nos frères qui ont tant souffert en ces jours cruels… » a-t-il assuré.

S’adressant à Sa sainteté le patriarche Cyrille, Sa Béatitude a déclaré respecter sa position sur la crise en Syrie, se disant aussi fier de la compassion et de la noblesse incitant à fournir une aide humanitaire « qui est la couronne, ornant et affermissant l’histoire des relations russo-antiochiennes. Nous apprécions infiniment le travail et la sollicitude de la Russie pour éliminer le terrorisme, rétablir la paix en Syrie et préserver la stabilité au Liban. »

Le patriarche Jean X a conclu en disant sa joie de participer aux célébrations du centenaire du Concile local : « La renaissance de la Sainte Russie est un cadeau du ciel. Dieu fasse que par les prières et par l’intercession des nouveaux-martyrs, des confesseurs, des héros de la foi et des pasteurs ayant illuminé la Russie et le monde orthodoxe entier durant les années de persécution, nous témoignions de la joie de la résurrection. »

« Béatitude, vous nous avez profondément touchés en parlant de façon si pénétrante de ce qui se passe aujourd’hui au Proche-Orient, a répondu S. S. le patriarche Cyrille. (…) Je vous assure que tout ce que nous faisons avec la grâce de Dieu, nous le faisons humblement, bien certains de la nécessité de partager nos ressources avec ceux qui souffrent vraiment aujourd’hui. Nous croyons qu’une paix juste et durable s’établira bientôt en Syrie. Nous croyons en la victoire sur le terrorisme, en la délivrance du peuple syrien…, au retour à la vie sur le territoire canonique de votre Église. Que Dieu vous donne la force et la santé nécessaires pour continuer à servir votre peuple si pieux et si éprouvé. »

Prenant la parole, le patriarche Théophile III de Jérusalem a transmis notamment « aux bien-aimés archipasteurs et à tous nos frères orthodoxes russes le message intemporel d’espérance du Seigneur de gloire né à Bethléem, du Christ Homme-Dieu qui vécut sur l’humble terre de Palestine. » « Les prières de tant de milliers de nouveaux-martyrs russes, n’ayant rien à envier aux martyrs de l’Antiquité, ont libéré votre Église de la tyrannie et l’affermissent… ».

Le primat de l’Église orthodoxe russe a remercié Sa Béatitude « de ces paroles pénétrantes, dans lesquelles se font sentir la force du témoignage des sanctuaires de Jérusalem, dont vous êtes le gardien et devant lesquels vous priez. Une mission particulière vous est confiée, celle de prier pour tous, pour toute l’Église orthodoxe, pour le genre humain devant le Golgotha et le vivifiant Sépulcre, devant tous les lieux saints vers lesquels affluent de grandes quantités de pèlerins de toute la Rus’ historique. Je vous remercie de votre sollicitude envers ces pèlerins. »

Le chef de la délégation géorgienne a lu le message de Sa Sainteté et Béatitude le catholicos-patriarche de Géorgie Élie II : « Au nom de l’Église orthodoxe géorgienne et en mon nom propre, nous vous félicitons, partageant avec vous la joie spirituelle de ce grand évènement qu’est le centenaire du Concile local de l’Eglise orthodoxe russe, qui prit la décision historique de rétablir le Patriarcat. Ces sentiments nous sont très proches, car l’Église orthodoxe géorgienne a aussi subi l’amertume de la suppression du Patriarcat et de l’autocéphalie, avant de vivre l’immense joie de sa restauration. Nous avons subi les mêmes épreuves pendant les temps de l’athéisme, mais nous avons supporté cette épreuve, à force d’abnégation, remplissant un ministère s’apparentant véritablement au martyre. »

Sa Sainteté le patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie a prié le chef de la délégation de l’Église géorgienne de transmettre sa gratitude à Sa Sainteté et Béatitude le patriarche-catholicos de toute la Géorgie, disant espérer que le Seigneur l’aiderait à servir encore de longues années pour le bien de la Sainte Église orthodoxe et celui de son peuple.

« Nous sommes particulièrement heureux d’être ici aujourd’hui à la tête de la délégation de l’Église serbe dans la ville de Moscou, dans cette Russie fraternelle, gardée de Dieu, alors que la grande Église russe fête une date historique, le centenaire de la restauration du Patriarcat » a dit le patriarche Irénée de Serbie. « Mes prédécesseurs au siège patriarcal et tout le peuple serbe se sont sincèrement réjouis avec leurs frères russes, lorsqu’au XVI siècle les sages patriarches d’Orient, le patriarche Jérémie de Constantinople à leur tête, ont accompli une œuvre grande, juste et agréée de Dieu en proclamant le Patriarcat de Moscou, afin que les Russes et les peuples voisins, attirés par la Sainte foi orthodoxe, aient leur propre patriarche, celui de Moscou, de toute la Russie et de tous les pays du nord. »

« Grand a été l’évènement de la restauration du Patriarcat russe. Si grand qu’il a involontairement touché d’autres Églises, a témoigné le patriarche Irénée. Deux années ne s’étaient pas écoulées après la restauration du Patriarcat russe que l’Église serbe retrouvait ses frontières historiques (…) et, en 1920, sa glorieuse dignité patriarcale. » Le siècle que nous commémorons n’a pas été paisible : « Nos peuples ont beaucoup souffert des ennemis de la foi, ils ont subi de terribles souffrances… Mais plus le peuple russe souffrait, plus sa volonté de salut grandissait… Les tentatives des serviteurs des ténèbres pour éteindre la lampe de la foi orthodoxe se sont avérées vaines. Aujourd’hui, nous voyons l’Église russe et son Patriarcat rétablis dans une gloire plus grande encore. »

Le patriarche Cyrille a remercié le primat de l’Église serbe : « Cette salutation venant du peuple serbe, qui nous est proche par le sang, par la langue, par la culture, par l’histoire, car nous avons tant en commun, nous touche particulièrement… Nous nous sommes efforcés de surmonter les dures années où l’Église était opprimée pour des raisons idéologiques au XX siècle. Aujourd’hui, nous nous réjouissons de ce que nos Églises, faisant partie de l’Orthodoxie universelle, œuvrent avec toutes les autres Églises… contribuant au témoignage orthodoxe dans le monde entier. »

Dans son discours, le patriarche Daniel de Roumanie a souligné que le ministère du patriarche Tikhon avait débuté à une période particulièrement difficile pour le peuple russe.

« La dignité et la responsabilité de patriarche de Moscou et de toute la Russie a été confrontée à bien des souffrances à cause des persécutions contre l’Église de la part du régime bolchevik, a poursuivi Sa Sainteté le patriarche Daniel. (…) Aujourd’hui, en ce jour solennel pour Moscou, alors que nous fêtons avec la participation des représentants des Églises orthodoxes autocéphales le centenaire du rétablissement du Patriarcat dans l’Église orthodoxe russe, la situation est différente. Nous sommes dans une période de liberté de confession de la foi, et nous portons aussi une lourde responsabilité pastorale devant les nouveaux défis de la société contemporaine. »

« Je suis heureux d’avoir pu rendre une visite fraternelle à l’Église de Roumanie avant ces célébrations, a répondu le patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie, constatant qu’il avait été pendant sa visite à Bucarest témoin de la renaissance de l’Eglise orthodoxe de Roumanie, de la construction de nouvelles églises et de la réorganisation de la vie ecclésiastique.

Le métropolite Gabriel de Loveč a lu le message de S. S. le patriarche Néophyte de Bulgarie et du Saint Synode de l’Église orthodoxe bulgare. Dans son message, le patriarche Néophyte constate l’importance pour le témoignage orthodoxe, pour la mission dans le monde de l’Église orthodoxe, du rôle de « la glorieuse et martyre Église orthodoxe russe, qui a toujours occupé et continue à occuper une place unique dans le monde orthodoxe. Cette Église, qui est passé par tant d’épreuves et a résisté aux menaces de l’intérieur et de l’extérieur, aux pressions et aux persécutions, sortant toujours purifiée du feu du martyre, plus forte et plus unie, est respectée dans les relations interorthodoxes de toutes les Églises pour son témoignage éclatant du Christ ressuscité. »

Sa Sainteté le patriarche Cyrille a exprimé sa reconnaissance au patriarche Néophyte, priant que lui soient transmis ses prières et ses vœux de prompt rétablissement. Sa Sainteté a souligné la communauté culturelle, linguistique et religieuse entre les deux peuples, russe et bulgare. Malgré les vicissitudes de l’histoire, le lien spirituel entre eux est toujours resté vivant. « Ce ne sont pas les régimes politiques qui sont les gardiens de ce lien, ni l’idéologie, mais l’Église orthodoxe », éduquant les peuples dans la conscience de cette proximité spirituelle. « Dieu fasse que cela continue, et que nos Églises servent l’unité de la Sainte Orthodoxie et le témoignage chrétien dans le monde entier avec les autres Églises orthodoxes. »

L’archevêque Chrysostome II de Chypre est revenu sur l’héroïsme des défenseurs de la foi à l’époque des persécutions contre l’Église russe, qui, « par leur exploits ont contribué à la restauration du patriarcat en Russie. » Soulignant qu’il avait plu à Dieu dans son ineffable Providence, que des « vents contraires à l’Église » soufflent « pendant un peu plus de soixante-dix ans, menaçant sérieusement le pieux peuple russe » au moment où le Patriarcat était restauré « Mais ils n’ont pu éteindre le feu de la foi en Christ », a poursuivi le primat de l’Église de Chypre. « En ces temps difficiles, regardant l’Église orthodoxe russe, nous avons pu voir qu’elle était comme un roc au milieu des flots écumants, sur lesquels venaient se briser les lames, la foudre, le tonnerre et les tempêtes. Nous avons vu dans quelles conditions extrêmement critiques, poursuivant leur ministère de pasteur, ses patriarches et ses évêques ont manifesté leur courage. Ils ont illustré ce que nous confessons : depuis deux mille ans, le martyre a toujours été la plus grande manifestation de conscience de l’Église. Ils nous ont montré que même dans les conditions les plus difficiles, le croyant peut être heureux et ressentir la joie de l’espérance d’un meilleur lendemain. » L’archevêque Chrysostome a conclu en remerciant le patriarche et le peuple russe de leur fermeté chrétienne dans cette période, qui a permis que « votre Église existe aujourd’hui librement. »

« Aujourd’hui, nous, orthodoxes, sommes appelés à regarder de l’avant, vers les problèmes qui nous touchent, oubliant le passé, a-t-il poursuivi. Dans l’Orient orthodoxe, cette région où nous vivons, le matérialisme et le relativisme venus d’Occident se répandent toujours plus profondément. C’est un fait, le progrès matériel a rendu notre vie plus confortable et a permis d’améliorer sa qualité. Mais nous comprenons de mieux en mieux que l’homme ne vit pas seulement de pain (Lc 4, 4). Chassant Dieu, différents systèmes affirment « qu’au commencement était l’économie », tandis que pour l’Église, au commencement, au centre et à la fin est l’homme, cette création de Dieu unique. »

« Vous avez trouvé des mots prophétiques pour décrire ce qui se passe aujourd’hui, a répondu le primat de l’Église orthodoxe russe. Je pense que ces mots, adressés à nous tous, sont un appel à travailler ensemble, comme une seule famille, comme une seule Église, pour porter au monde un témoignage allant contre « la voie large » sur laquelle s’est engagée presque toute l’humanité. Aller à contre-courant est toujours difficile. Mais le Seigneur nous a dit que seule la voie étroite mène au Royaume des cieux. Il ne faut pas que nous perdions la force de témoigner au monde de la voie étroite… »

L’archevêque Anastase de Tirana et de toute l’Albanie est intervenu à son tour devant l’assemblée pour glorifier Dieu qui « a suscité dans l’Église orthodoxe des dirigeants lumineux, ainsi que des myriades de clercs et de laïcs qui, pendant cette « longue nuit » de persécutions, prédite par le patriarche Tikhon, sont restés inébranlables dans la foi… La personnalité du patriarche Tikhon, à laquelle nous réfléchissons en ces jours, rappelle aux orthodoxes leur devoir de toujours. Pendant la première étape de sa vie, il a été missionnaire, prêchant l’Orthodoxie en Alaska, puis, dans les diocèses de Russie. Enfin, devenu primat de l’Église russe, il a œuvré pour l’unité, résistant à différents courants schismatiques, manifestant son amour du Christ par le sceau du martyre. Ainsi, saint Tikhon a véritablement rempli le devoir apostolique et pastoral que le Christ Jésus Lui-même a intimé aux hommes avant Son ascension (…) »

« Nous avons écouté votre témoignage avec une attention particulière, car vous êtes le premier primat de l’Église orthodoxe albanaise, renée de ses cendres après avoir été détruite entièrement et pour longtemps, a répondu le patriarche Cyrille. L’expérience de l’Église que vous dirigez, la tragédie du peuple orthodoxe d’Albanie nous sont très proches, ainsi que la compréhension de l’histoire et du passé dont vous venez de parler si éloquemment, ainsi que votre regard sur l’avenir. »

« Le Concile a rétabli le Patriarcat et élu au siège patriarcal le métropolite de Moscou Tikhon. Ce fait a servi à l’unité de l’Église et le patriarche Tikhon a été un exemple de fidélité au Christ, d’espérance, de réconciliation et d’amour » a constaté Sa Béatitude le métropolite Sabas de Varsovie et de toute la Pologne, assurant que le nom du saint patriarche Tikhon était très vénéré des fidèles de l’Église polonaise, notamment parce qu’il avait été recteur du séminaire de Kholm, puis évêque de Lublin, vicaire du diocèse de Varsovie et de Kholm, visitant 110 des paroisses du diocèse. « Nous sommes heureux de pouvoir être avec vous aujourd’hui et d’en témoigner… »

Le patriarche Cyrille a remercié le primat de l’Église orthodoxe polonaise, ajoutant : « Que Dieu nous aide tous ensemble et chaque Église en particulier à porter au monde le témoignage sans lequel il n’y aura ni chemin, ni vie, mais quelque chose qui peut être dangereux pour l’existence du genre humain. »

Dans son allocution, Sa Béatitude le métropolite Rostislav des Terres tchèques et de Slovaquie a remarqué à propos de l’élection du patriarche Tikhon : « Cet évènement capital n’a pas été important pour la seule Église orthodoxe russe, mais pour l’ensemble du monde orthodoxe, notamment pour notre Église locale. Aujourd’hui, nous souvenons de ces évènements d’il y a cent ans, nous voyons clairement l’action de la Providence dans la restauration du Patriarcat en Russie. Le patriarche, comme un phare spirituel, a été un repère dans un temps de chaos politique, de destruction totale et d’appauvrissement spirituel. Malgré toutes les difficultés vécues par le peuple russe, l’Église orthodoxe en Russie a su non seulement survivre et renaître, passant par le creuset de terribles épreuves, de railleries et d’humiliations, mais aussi aider les Églises orthodoxes sœurs dans leur cheminement historique, notamment notre Église des Terres tchèques et de Slovaquie, qui a tant souffert. »

« Je remercie Votre Béatitude de ces paroles pénétrées d’amour fraternel, a répondu le primat de l’Église russe. Nous regardons votre Église avec un sentiment particulier, sachant combien son histoire est complexe et ayant conscience qu’en des temps difficiles et en tenant compte des circonstances historiques, l’Église orthodoxe russe a dû prendre sur elle la responsabilité de la survivance de l’orthodoxie dans les Terres tchèques et slovaques. C’est pourquoi la prospérité de votre Église aujourd’hui nous réjouit tant, et nous prions pour que le Seigneur la garde dans l’unité et préserve en elle la force missionnaire, si essentielle pour la conversion des hommes qui l’entoure et pour soutenir la foi chez ses membres. »

« Je suis venu depuis les lointaines terres de l’Amérique du Nord avec une petite délégation, représentant l’Église orthodoxe en Amérique, pour proposer quelques mots à cette assemblée sur le grand homme de Dieu, sur le confesseur dont je porte le nom et qui fut mon prédécesseur aux États-Unis et au Canada, où il poursuivit son ministère comme évêque diocésain de 1898 à 1907. L’évêque Tikhon avait sa propre vision de l’orthodoxie en Amérique, pour lui, la future Église orthodoxe du Nouveau monde devait englober des communautés ayant à leur tête des évêques arabes, grecs et serbes, rassemblés en un seul archevêché, présidé par un archevêque orthodoxe russe. Il existe un document écrit, dans lequel l’archevêque Tikhon expose sa vision d’une future Église orthodoxe autocéphale dans le Nouveau monde » a rappelé Sa Béatitude le métropolite Tikhon de toute l’Amérique et du Canada.

Comme l’a remarqué le primat de l’Église orthodoxe en Amérique, saint Tikhon est rentré des champs missionnaires américains, mûrs pour la moisson, pour entrer dans un monde où s’amoncelaient des nuages noirs, où bientôt coulerait le sang versé par la révolution bolchevik de 1917. « La restauration du patriarcat, en 1917 n’a pas été une simple décision administrative et ecclésiastique découlant de la nécessité historique, mais un évènement véritablement prophétique, plaçant un homme d’une intégrité et d’une sainteté profonde dans une situation qui s’est révélée pour lui une lourde croix, mais a été une source d’unité pour ses ouailles » a-t-il assuré. « Aujourd’hui, sa vie et son héritage nous permettent d’espérer que notre soif d’une vie meilleure peut être désaltérée dans l’Église, même dans un monde post-chrétien et anti-chrétien. »

Le patriarche Cyrille a remercié Sa Béatitude, notamment d’avoir évoqué la mission de saint Tikhon sur le continent américain : « Il est bon que vous ayez fait le lien entre son ministère en Amérique et son élection au siège patriarcal. Rien n’arrive sans la providence divine, notre Église, à l’époque la plus difficile, a été dirigée par un homme possédant une grande expérience, ayant une vision non pas, disons, provinciale, de l’orthodoxie, mais globale. »

« Par ailleurs et c’est peut-être l’essentiel, saint Tikhon vivait d’une vie intérieure intense, et c’est cette force spirituelle intérieure qui inspirait tous ceux qui venaient à lui, a souligné le primat de l’Église russe. Il n’y avait pas la gloire extérieure, ni le protocole établi au cours des siècles qui entoure d’ordinaire le primat de l’Église. Saint Tikhon ne pouvait accomplir son ministère comme l’accomplissent les primats des Églises orthodoxes locales, mais sa force résidait dans l’humiliation par laquelle il est passé. C’est elle qui affermissait ceux qui doutaient, qui étaient saisis par la peur, qui étaient prêts à devenir fous. L’exemple du patriarche a empêché beaucoup de gens de faire des erreurs, notamment des hiérarques orthodoxes, des membres du clergé. Ceux qui ont commis l’erreur, sont tombés dans le schisme, sont par la suite, pour ceux qui sont restés en vie, revenus dans le sein de la Sainte Église orthodoxe, à l’Église que les persécuteurs appelaient avec mépris « tikhonienne », mais qui manifestait sa force à tout le peuple, à tout l’univers. »

Sa Sainteté a exprimé sa gratitude à tous les primats et aux représentants des Églises orthodoxes locales « qui partagent avec nous ces souvenirs sacrés, partagent avec nous la célébration du 100e anniversaire de la restauration du Patriarcat dans l’Église russe. »

Le patriarche Cyrille a aussi remercié tous les hiérarques venus à Moscou participer au Concile épiscopal de l’Eglise orthodoxe russe, et a décrété que le Concile était clôt.