Le 6 février 2013 s’est déroulée une conférence de presse consacrée au bilan du Concile épiscopal de l’Église orthodoxe russe, convoqué à Moscou du 2 au 5 février. Etaient venus rencontrer les journalistes à l’église du Christ Sauveur le métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou, le métropolite Paul de Riazan et de Mikhaïlovsk, chef du groupe de rédaction du Concile épiscopal, le métropolite Antoine de Borispol, chancelier de l’Église orthodoxe d’Ukraine, premier vicaire du diocèse de Kiev, l’archimandrite Savva (Toutounov), vice-chancelier du Patriarcat de Moscou, l’archiprêtre Vsevolod Tchapline, président du Département synodal pour les relations entre l’Église et la société et V. Legoïda, président du Département synodal d’information.

S’adressant aux représentants des médias, le métropolite Hilarion a dit notamment :

« Le présent Concile épiscopal a été le concile le plus représentatif de toute l’histoire de l’Église orthodoxe russe. Jamais autant d’évêques n’avaient été réunis pour les célébrations à l’église du Christ Sauveur, ni avant la révolution, ni à notre époque. Jamais autant d’archipasteurs ne s’étaient rassemblés à la salle des Conciles pour discuter des problèmes actuels de la vie de l’Église.

Suivant les Statuts, le Concile épiscopal doit être convoqué au moins une fois tous les 4 ans, mais il se réunit en général environ tous les deux ans. Sa convocation est précédée d’un grand travail de préparation. Afin que les discussions aux Conciles soient précises et parviennent à des résultats concrets, une Conférence interconciliaire a été créée à l’initiative du Patriarche Cyrille, sur le modèle de la Conférence interconciliaire qui fonctionnait à l’époque de la préparation du Concile local de 1917-1918.

La conférence interconciliaire est un organe de délibération divisé en plusieurs commissions. Chacune de ces commissions discute des thèmes de la vie de l’Église relevant de sa compétence. Parmi les questions abordées, certains sujets controversés et largement débattus au sein de l’Église, tant au niveau du clergé qu’au niveau des laïcs. La conférence interconciliaire doit préparer l’ordre du jour du Concile épiscopal afin qu’il puisse prendre des décisions sur la base des débats qui auront déjà eu lieu.

Le présent Concile épiscopal a fonctionné suivant ce modèle, c’est-à-dire qu’il a été consacré à l’examen de documents élaborés par la Conférence interconciliaire. Naturellement, nous n’avons pu aborder tous les thèmes, mais le Concile a pu débattre de certaines questions particulièrement importantes, comme la position de l’Église sur la justice juvénale et la réforme du droit de la famille, la position de l’Église sur les questions écologiques et sur les nouvelles techniques de comptage et d’identification des personnes, de même que des questions relatives à la vie interne de l’Église.

(…) J’aimerais souligner que la concorde régnait au Concile. Beaucoup de documents ont été adoptés à l’unanimité. Cette atmosphère fraternelle constructive a beaucoup contribué au succès du Concile.

Un certain nombre d’archipasteurs participait pour la première fois à une assemblée aussi respectable dans la mesure où de nombreux sacres épiscopaux ont été célébrés ces dernières années. Le Patriarche Cyrille a initié ce processus après son accession au trône patriarcal moscovite. En conséquence de ce processus qui a reçu l’appelation très conventionnelle de « morcellement de diocèses » nous avons maintenant sur le territoire d’une région où n’existait auparavant qu’une éparchie deux, trois ou quatre diocèses réunis en métropole. L’Église donne ainsi une nouvelle impulsion à sa mission et à ses relations avec la société.

Ce processus touche en premier lieu ce qu’on appelle la « Russie profonde ». Lorsque nous parlons de la renaissance de la vie de l’Église ces 25 dernières années, nous pensons avant tout à ce qui s’est produit dans les grandes villes. La renaissance ecclésiale est particulièrement visible dans les grandes municipalités et les centres régionaux où été bâties de grandes cathédrales, construites des écoles religieuses et où la vie chrétienne est très active. Malheureusement, dans les régions éloignées, cette renaissance ne se fait pas toujours sentir, nous avons beaucoup de petites villes, de villages, de campagnes où la présence religieuse est encore faible. Les ennemis de l’Église, les sectateurs en profitent pour féployer leur mission là où l’Église n’est pas suffisamment représentée. Il s’agit de créer de nouveaux diocèses et de nouveaux centres diocésains là où il n’y en avait encore jamais eu pour que les évêques se rapprochent du peuple, pour que leur espace de travail soti clairement visible. En effet, jusqu’à ces dernières années certains diocèses pouvaient compter 500 ou 600 paroisses et il fallait parfois plusieurs heures de transport aérien pour parcourir un diocèse d’un bout à l’autre. Dans les diocèses qui se créent actuellement, l’évêque a la possibilité de connaître personnellement chaque prêtre, peut visiter les paroisses, influencé réellement leur vie. Tout cela est reflété dans les décrets du Concile épiscopal.

C’était la première fois qu’il y avait autant de klobuks blancs au Concile, c’est-à-dire que le nombre de métropolites a beaucoup augmenté, et c’était un symbole visible des processus en cours ces dernières années.

(…) Je peux dire en mon nom propre que les recommandations du Concile épiscopal qui ont été données concernant la sphère de mes compétences en tant que président du Département des relations extérieures et que président de la Commission synodale biblique et théologique sont très concrètes. Il me faudra même parfois revoir les plans que j’avais formés auparavant. Par exemple, nous avons parlé au Concile du Catéchisme de l’Église orthodoxe russe dont l’éléboration a été confiée à la Commission synodale biblique et théologiqie. J’avais prévu d’étaler ce travail sur 4 années supplémentaires, compte tenu de la vitesse à laquelle travaillent nos théologiens. Mais le Concile épiscopal a fermement décrété que le Catéchisme devrait être prêt dans deux ans. Je devrais donc convoquer la commission théologique en urgence, prendre des mesures pour stimuler les auteurs, etc (…)

Je suis certain que les décisions conciliaires stimuleront le développement fructueux ultérieur de notre vie ecclésiale. »

D’autres participants de la conférence de presse ont parlé des documents adoptés lors du dernier Concile épiscopal de l’Église orthodoxe russe. L’achiprêtre Vsevolod Tchapline a ainsi remarqué : « Les thèmes de la justice juvénale, du contrôle électronique et de l’écologie ont été posés par de simples fidèles. Ce n’est pas le Concile qui les a inventés… Le Concile a répondu à la demande des gens qui voulaient que l’Église s’exprime officiellement sur ces thèmes. »

Répondant aux questions des journalistes, le métropolite Hilarion a souligné l’importance des documents adoptés par le Concile sur la position de l’Église orthodoxe russe quant à l’écologie, sur la réforme du droit de la famille et sur les problèmes de la justice juvénale.

On entend parfois dire que l’écologie est une affaire de spécialistes, que l’Église ne doit pas s’exprimer sur ce thème. Pourtant, estime le président du DREE, la situation écologique dépend des gens eux-mêmes. « Lorsque nous parlons des dégâts causés à la nature, nous pensons avant tout à la pollution de l’environnement par les usines qui rejettent leurs déchets. Mais nous oublions que chacun de nous est responsable de l’environnement » a dit le métropolite. « J’ai beaucoup voyagé et il me semble que la situation écologique que nous créons autour de nous est comparable, dans le meilleur des cas, à celle des pays du Tiers-monde » a-t-il ajouté. Suivant Mgr Hilarion, l’une des tâches de l’Église consiste à éduquer le respect envers l’environnement.

Le document consacré à la réforme du droit de la famille et aux problèmes de la justice juvénale aborde de nombreux thèmes touchant directement au quotidien des gens, a constaté le président du DREE. « D’une part nous comprenons que les enfants ont besoin d’être défendus, que la situation dans certaines familles est très difficile. Certaines formes de contrôle de la part de l’état peuvent naturellement être nécessaires dans ce domaine, voire, dans certains cas, se révéler absolument nécessaires et inévitables » estime l’archipasteur. « Mais nous ne devons pas oublier que la famille a la responsabilité première de l’éducation des enfants et l’état ne doit pas s’élever au-dessus de la famille, a souligné le métropolite Hilarion. Les parents ne doivent pas vivre dans la crainte qu’on leur arrache leur enfant ». Suivant le métropolite, la situation démographique dans le pays est loin d’être idéale, c’est pourquoi il faut aspirer à ce que les enfants soient élevés au sein de leurs familles dans les conditions les plus favorables possibles et à inciter les parents à avoir deux enfants et plus.

Le métropolite Hilarion a également parlé de la prochaine visite du Patriarche Cyrille de Moscou en Estonie et exprimé l’espoir que les problèmes causés par les propriétés du Patriarcat de Moscou dans ce pays seraient prochainement réglés. « J’aimerais souligner que la situation évolue positivement et dire que des pas en avant ont été fait pour que l’Église orthodoxe estonienne du Patriarcat de Moscou, qui comprend la majorité absolue des croyants orthodoxes d’Estonie puisse célébrer ses offices sans être inquiétée dans les églises qui lui appartiennent. Le problème est que l’Église estonienne du Patriarcat de Constantinople a reçu en propriété toutes les églises qu’elle utilise, tandis que l’Église estonienne du Patriarcat de Moscou loue ses églises soit à l’état, soit aux municipalités. Et nous sommes convaincus que cette situation doit changer » a dit le métropolite Hilarion de Volokolamsk. Une grande partie des bâtiments religieux orthodoxes en Estonie a été construite avant la révolution par les fidèles de l’Église orthodoxe russe. « Je suppose que ces questions seront abordées pendant la visite du Patriarche en Estonie ».

Le métropolite Hilarion a également parlé de l’enseignement de la théologie dans les universités publiques, rappelant que des facultés et des chaires de théologie étaient ouvertes depuis longtemps dans les établissements publics et que le processus se poursuivait. Aujourd’hui, plus de 40 facultés existent dans différents établissement d’enseignement supérieur.

« Quels problèmes rencontrons-nous dans ce domaine ? a poursuivi le métropolite Hilarion ? En premier lieu, nous sommes confrontés à des résistances de la part de certains membres de la communautés scientifique, qui s’opposent à l’idée même d’un enseignement de la théologie dans une université publique. (…) Pourtant, il suffit de constater qu’en Europe occidentale et en Amérique où l’Église est séparée de l’état et où la théologie reste malgré tout une discipline scientifique, des facultés de théologie existent précisément au sein des universités laïques. D’autres problèmes existent en Fédération de Russie, en particulier la suppression du nombre d’établissements supérieur : certains établissements jugés non efficaces sont réunis à d’autres (…). Nous devons nous assurer de ce que lorsque deux établissements se fondent les chaires de théologie existantes ne se dissoudront pas dans autre chose. Enfin, il y a encore le problème des bourses qu’il est difficile de résoudre. Nous sommes convaincus de ce que le nombre de bourses en théologie devrait être proportionnel au nombre de bourses dans les autres disciplines (…)