L’appel a été adopté à l’issue de la réunion du Haut Conseil de l’Église orthodoxe russe, qui s’est tenue le 3 avril 2012 en la cathédrale du Christ Sauveur de Moscou.

L’Église orthodoxe russe, accomplissant sa mission d’annonce de l’Évangile, exprime une position engagée sur de nombreuses questions d’actualité et participe activement à la résolution des problèmes sociaux contemporains. L’aide apportée à des milliers de personnes durant les incendies de 2010, la quête de fonds et de biens matériels en faveur des catégories défavorisées de citoyens, un travail diversifié avec les enfants et les jeunes, la vénération de la Ceinture de la Mère de Dieu par des centaines de milliers de fidèles ont démontré la capacité de l’Église à unir des millions de personnes dans la prière, les bonnes actions, le souci de l’avenir de notre peuple. Malheureusement, tous sont loin de s’en réjouir ni de l’admettre.

Les forces anticléricales craignent le renforcement de l’Orthodoxie dans le pays, ils sont effrayés par le réveil de la conscience nationale et de l’initiative populaire de masse. Ces gens sont peu nombreux, mais certains d’entre eux sont influents et prêts à utilier leurs ressources financières, informationnelles et administratives pour discréditer les hiérarques et les clercs, pour susciter des schismes et détourner les gens des églises.

A ces forces se joignent les promoteurs des fausses valeurs du libéralisme agressif, car l’Église est inébranlable dans sa position de rejet de manifestations antichrétiennes comme la reconnaissance des unions homosexuelles, la liberté d’exprimer tous ses désirs, la consommation effrénée, la propagande de la permissivité et de la débauche. Par ailleurs, les attaques contre l’Église profitent à ceux dont les intérêts mercantiles sont dérangés par le programme de construction de nouvelles églises dans les quartiers les plus peuplés de Moscou ou d’autres grandes villes.

La confrontation de l’Église et des forces antichrétiennes devient de plus en plus évidente et de plus en plus vive. Les attaques se sont faites particulièrement visibles durant les périodes préélectorale et postélectorale, ce qui témoigne de ses ressorts politiques, y compris anti-russes. Différents moyens sont mis en œuvre, un travail de discréditation planifié et systématique est effectué. Les clercs sont impliqués dans des provocations, les évêques et le clergé sont soumis à l’attention accrue des mécontents à l’affût du moindre prétexte pour tout déformer et livrer en patûre une information sale.

Plusieurs actes de vandalisme et de profanation des églises ont eu lieu récemment. Tout a commencé le 21 février par un acte blasphématoire dans l’église cathédrale du Christ Sauveur. Ce jour-là un groupe de personnes blasphème à l’ambon, à proximité du saint autel, des reliques de la Tunique de Notre Seigneur Jésus Christ et de la Tunique de la Mère de Dieu, des reliques de grands saints. Le 6 mars, dans la cathédrale Saint-Procope à Veliky Oustioug, un homme muni d’une hache porte des coups à 30 icônes d’une grande valeur spirituelle, historique et artistique. Le 18 mars, l’église Saint-Serge-de-Radonège de la ville de Mozyr est profanée par des inscriptions blasphématoires et la représentantion de la Sainte Croix vivifiante subit des outrages. Le 20 mars, dans la cathédrale de la Protection de Nevinnomyssk, un homme s’introduit avec un couteau de chasse, renverse les icônes, plante son couteau dans le crucifix, frappe le prêtre, brise les Portes Royales et profane l’autel du Seigneur. Dans le même contexte se déroule une attaque calomnieuse contre le Primat de l’Église. Tous ces faits s’inscrivent dans une même campagne contre l’Orthodoxie et l’Église orthodoxe russe.

Il n’est pas exclu que de nouvelles accusations et déclarations fracassantes de la part des ennemis de la foi se répétent à l’avenir. Le danger de la tactique utilisée contre l’église tient à ce que, conformément aux règles de la manipulation de l’opinion publique, le mensonge voisine avec les faits réels, on tait ce qui désavantage, on s’offre des déclarations cyniques provoquant la colère, la peur, l’envie, l’indignation, la méchanceté. Tous les procédés de la réthorique noire sont mis à profit : une partie des faits est passée sous silence, le sens des évènements est réinterprété, l’auditoire est induit en erreur ou trompé.

Dans ces conditions, il importe que nous demeurions tous dans l’unité, ne nous laissions pas émouvoir par le mensonge et les provocations, apprenions à être critique envers toute information douteuse sur l’Église, à surveiller nos réactions et nos déclarations publiques et privées. Dans le même temps l’opposition à l’Église de la part de ses ennemis doit être prise en compte par l’Église dans son quotidien.

Ce qui se produit aujourd’hui n’est pas nouveau. Nous nous souvenons qu’au début du XX siècle les athées se sont levés contre la foi au Christ, contre la Sainte Église, contre les églises et les reliques, répétant les mêmes slogans. Il s’est trouvé alors des traîtres rénovateurs, prêts à livrer à l’infamie le nom de Dieu, les saintes icônes et les églises, à livrer à leur perte le Primat, les évêques, les pasteurs, les moines, les laïcs. Mais notre peuple s’est exprimé. En 1918, les croyants ont empêché la fermeture et la profanation de la Laure Saint-Alexandre-Nevski, attaquée par les athées militants. Les clercs et les laïcs ont défendu d’autres églises. Beaucoup ont témoigné de leur fidélité au Christ et à Son Église en tombant de la main des athéistes.

Aujourd’hui aussi, nous devons défendre ce qui nous est donné par Dieu, ce qui est cher à nos cœurs. Et que les fidèles ne se laissent pas troubler par la parole de ceux qui invitent à accepter le péché et l’impiété, à pardonner à ceux qui ne demandent pas pardon et déclarent qu’ils n’en ont pas besoin. Souvenons-nous que l’absence de repentir est capable de confirmer le pécheur dans la conscience de son « bon droit » et le pousser à répéter ses actes.

Nous appelons tous les hiérarques, pasteurs et laïcs à manifester de nouveau au monde le triomphe de la vérité du Christ le 22 avril, jour où l’Église fait mémoire de la confession de foi de saint Thomas en célébrant un office et une station pour la défense de la foi, pour les reliques profanées, l’Église et son nom. Nous appelons à célébrer ces offices et ces veillées dans chaque cathédrale des diocèses de l’Église russe. A Moscou, ils auront lieu devant l’église du Christ Sauveur, devant les icônes et la croix ayant souffert de la main de malfaiteurs et de fous.

En ces jours du Grand Carême, nous nous adressons à tous ceux qui nous entendent, les appelant au repentir et à la conversion. C’est le repentir qui ouvre les portes du pardon. Le Seigneur et l’Église sont prêts à accueillir avec joie tout pécheur repentant. A ceux qui pleurent et se désolent des récents évènements, nous rappelons cette parole du Seigneur Jésus lui-même : « Dans le monde, vous connaîtrez la détresse, mais ayez confiance : moi, je suis vainqueur du monde » (Jn 16, 33).

Nous sommes certains que, comme au XX siècle, l’Église sortira plus forte des épreuves présentes. Ni ces temps nouveaux difficiles, ni les « impuissantes audaces » ne nous sépareront ni ne nous affaibliront, car nous les dépasserons dans la prière et l’espérance dans l’aide toute-puissante de Dieu, sachant que tout mal et toute injustice sont déjà vaincus par la puissance de la Croix et de la Résurrection du Christ.