Le 12 novembre 2011, le Patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie est arrivé à Damas. Le Primat de l’Église russe est accompagné du métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou, de l’évêque Serge de Solnetchnogorsk, directeur du secrétariat administratif du Patriarcat de Moscou, de l’archiprêtre Nicolas Balachov, vice-président du DREE, de l’archidiacre Vladimir Nazarkine et de M. Kouksov, secrétaire personnel intérimaire du Patriarche. L’archevêque Niphon de Philippopolis, représentant du Patriarcat d’Antioche à Moscou est également arrivé à Damas.

Sa Sainteté le Patriarche Cyrille a été accueillie à l’aéroport par le Patriarche Ignace IV d’Antioche la Grande et de tout l’Orient ainsi que de nombreux hiérarques de l’Église d’Antioche, le représentant du Patriarcat de Moscou près le Patriarche d’Antioche, des fonctionnaires et des diplomates syriens et russes.

Le Primat de l’Église orthodoxe russe s’est entretenu avec les journalistes dans l’enceinte de l’aéroport. Exposant l’objet de son voyage au Patriarcat d’Antioche, le Patriarche Cyrille a expliqué effectuer ce type de visite aux Églises orthodoxes locales sœurs, suivant la tradition, à la suite de son élection au Patriarcat et suivant l’ordre des dyptiques.

« Je suis heureux de pouvoir aujourd’hui étreindre mon bien-aimé confrère Sa Béatitude le Patriarche Ignace d’Antioche, de pouvoir prier avec lui, avec son peuple, de rencontrer les représentants des autorités civiles, a poursuivi le Patriarche. Des liens particuliers unissent la Russie et la Syrie depuis de nombreuses années. Je sais que je viens dans ce pays à l’heure où il traverse des temps difficiles. Mais l’histoire de la Syrie compte plusieurs millénaires. Ce pays dispose d’une immense tradition spirituelle. C’est le pays de la coexistence pacifique entre chrétiens et musulmans. Et je suis certain que la sagesse historique de ce peuple, sa mémoire historique l’aideront en ces temps délicats. Dans l’Église russe, nous prions pour le peuple syrien, nous croyons que Dieu déploiera sa miséricorde, que l’unité du peuple en sera renforcée, que les droits de toutes les religions seront respectés comme par le passé et que nous nous réjouirons des succès du peuple syrien. Que la miséricorde de Dieu soit avec vous ».

Répondant aux questions des journalistes sur les possibles modes de régulation du conflit en cours, Sa Sainteté à répondu : « Je ne suis pas un homme politique, je parle en tant que croyant. Je suis sûr que l’on peut résoudre tous les problèmes pacifiquement, par le dialogue. L’essentiel est que le sang humain ne coule pas. C’est pourquoi, comme de nombreuses personnes dans le monde, je vois la solution des problèmes que traverse le peuple syrien dans le dialogue ». Depuis l’aéroport, les Primats des Églises d’Antioche et de Russie se sont dirigés vers la cathédrale de Damas.

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Le territoire canonique de l’Église orthodoxe d’Antioche recouvre la province du Hatay (Turquie), la Syrie, le Liban, l’Irak, le Koweït et les pays de la Péninsule arabique.

L’Église a été fondée vers l’an 37 par les apôtres Pierre et Paul. C’est à Antioche que les disciples du Christ ont reçus le nom de chrétiens pour la première fois. L’apôtre Luc était originaire de cette ville.

Durant les trois premiers siècles, l’Église d’Antioche est restée territorialement parlant la plus grande du monde chrétien. Des saints aussi célèbres que la protomartyre Thècle, saint Ignace le Théophore, saint Georges, saint Hilarion le Grand, saint André de Crète, saint Jean Damascène, Ephrem le Syrien, Syméon le Stylite, saint Jean Chrysostome en sont originaires.

Au IVe siècle, Antioche se dote d’une école de théologie. Le monachisme se développe en Syrie à la même époque, se distinguant par son ouverture à la mission et au ministère social. Au Ve siècle se développe le mouvement des stylites, avec saint Syméon le Stylite.

Les hiérarques de l’Église d’Antioche ont pris une part active aux Conciles œcuméniques. En 451, l’Église d’Antioche acquiert le statut de Patriarcat.

A l’heure actuelle, le Patriarcat d’Antioche compte 24 diocèses et 400 églises, y compris en Amérique. Une part importante de ses fidèles se compose des diasporas libanaise et syrienne d’Amérique du Nord et du Sud, formées au XXe siècle à la suite de l’exode massif des populations chrétiennes, poussées par l’enchaînement des conflits au Proche Orient.

L’histoire des relations des Patriarcats d’Antioche et de Moscou est très ancienne. Les Patriarches d’Antioche ont largement contribué à la décision d’accorder l’autocéphalie et le statut de Patriarcat à l’Église orthodoxe russe. On sait que les patriarches Joachim, en 1586, et Macaire, en 1666-1667 se sont rendus en Russie.

La Russie et l’Église orthodoxe russe ont souvent soutenu l’Église d’Antioche lors des périodes difficiles. Les nombreux pèlerins russes en route vers la Terre sainte, dont une partie dépendait de l’Église d’Antioche, ont beaucoup contribué à cette œuvre.

Avec la création de la Société impériale orthodoxe de Palestine en 1882, l’aide à la Syrie se systématise. Grâce à la Société, de nombreuses écoles, de multiples hôpitaux et orphelinats sont ouverts sur les territoires actuels de la Syrie et du Liban, églises et monastères sont restaurés.

En 1848, un métochion de l’Église d’Antioche est ouvert à Moscou. Il fonctionnera jusqu’en 1929.

La révolution de 1917 et les persécutions athées en URSS mettent provisoirement un terme aux relations entre les Églises d’Antioche et de Russie. Les contacts reprennent après la Seconde guerre mondiale.

En mai 1946, une paroisse du Patriarcat de Moscou ouvre à Beyrouth.

Le 17 juillet 1948, le métochion de l’Église orthodoxe d’Antioche à Moscou rouvre ses portes. En mars 1958, une Représentation du Patriarcat de Moscou à Damas voit le jour.

Sa Béatitude le Patriarche Ignace IV d’Antioche s’est rendu à trois reprises en Russie, en 1981, 1988 et 2003, année où il reçut le prix de la Fondation de l’unité des peuples orthodoxes.

La visite du Patriarche Cyrille au Patriarcat d’Antioche est une « visite de paix » entreprise suivant la tradition orthodoxe par chaque Primat après son élection aux autres Églises orthodoxes locales dans l’ordre des dyptiques, cette liste traditionnelle des Primats des Églises.