Éminences, chers confrères archipasteurs,

Vénérables pères et frères membres de cette assemblée,

Votre Assemblée, par l’intermédiaire de son Président, Son Éminence le métropolite Emmanuel de France, m’a aimablement invité à participer à cette séance, et je vous en remercie. Je suis heureux de pouvoir m’entretenir fraternellement avec vous: cette rencontre était prévue depuis longtemps mais n’a pu avoir lieu qu’aujourd’hui du fait de circonstances diverses.

L’histoire de l’Orthodoxie en France aux XX et XXI siècles abonde en évènements et processus renvoyant à de nombreuses pages tragiques de l’histoire contemporaine de l’Église. L’Orthodoxie française s’est démarquée et se démarque toujours par l’intérêt qu’elle porte à l’organisation ecclésiale dans le contexte de la diaspora. La collaboration entre évêques des différentes Églises locales représentées en France compte plus d’une décennie, puisqu’elle débute en 1967. On peut dire que l’Assemblée des évêques orthodoxes de France, au même titre que la structure qui lui correspond en Amérique du Nord a été ces dernières décennies à l’avant-garde de la collaboration interorthodoxe dans la diaspora. Comme tout pionnier, l’Assemblée a naturellement traversé différentes crises de croissance, n’a pas toujours trouvé les méthodes de travail adéquates avant l’adoption en 2009 du Réglement actuel, concerté à la IV Conférence panorthodoxe préconciliaire.

L’exemple de l’AEOF démontre toute l’importance du principe de consensus dans la prise de décisions, principe fixé par le Règlement. L’emploi de cette méthode permet à l’Assemblée de prendre des décisions réfléchies et équilibrées au maximum, tenant compte des intérêts de chaque juridiction ; il permet d’éviter équivoques et désaccords et donc, dans les faits, de renforcer l’unité de l’Orthodoxie en France.

L’expérience positive d’application du principe consensuel dans le cadre de l’AEOF et d’autres assemblées épiscopales orthodoxes des différentes régions de la diaspora est un argument de plus en faveur de la conservation de ce principe dans le processus préconciliaire, où il a été appliqué durant plusieurs décennies. Grâce à lui, les Églises locales sont parvenues à un accord préalable sur huit des dix questions portées à l’examen du Concile. Comme l’a montré la rencontre des Primats et des représentants des Églises locales de novembre dernier à Moscou, de nombreuses Églises se prononcent en faveur de la conservation du principe de consensus tant durant le processus préconciliaire qu’au Concile lui-même. Grâce au concensus des membres du Concile – et dans le cas du Grand concile il s’agira si possible de tous les évêques orthodoxes – la voix de chaque Église, même celle de la moins nombreuse, sera entendue et il sera tenu compte de sa position. Ceci est particulièrement important pour la réception ultérieure des décisions du plérôme de l’Église. Nous devons tout faire pour éviter de nouvelles divisions.

La préparation du Concile panorthodoxe est étroitement liée à la question de l’organisation de la diaspora orthodoxe. Conformément au décret de la IVe Conférence panorthodoxe préconciliaire sur la diaspora orthodoxe, les Assemblées d’évêques canoniques orthodoxes des différentes régions du monde sont un organe provisoire appelé à préparer le terrain à une future organisation canonique de l’Orthodoxie dans ses régions. De mon point de vue on pourrait envisager cet avenir dans la formation – lorsqu’il plaira à Dieu – d’Églises locales polyethniques indépendantes. Certains l’envisagent différemment.

Néanmoins, le processus de perfectionnement de l’organisation canonique et le mouvement vers une plus grande unité exigent une extrême prudence. Dans ce domaine, on ne saurait parvenir à un résultat positif au moyen de transformations brutales qui ne font que multiplier les divisions et blesser les cœurs humains. Pour beaucoup d’orthodoxes de la diaspora, le lien avec les Églises-mères est tout à fait essentiel, il fait partie de leur identité spirituelle et ces sentiments ne doivent en aucun cas être méprisés.

Partant de cet état de fait, le Règlement du travail des assemblées épiscopales respecte le droit de chaque Église locale à développer ses propres projets missionnaires, éducatifs et culturels en collaboration avec les autorités locales et autres organismes.

Ceci ne doit pas, cependant, contrevenir aux objectifs des Assemblées épiscopales qui œuvrent à la confortation des fidèles locaux, au développement de la collaboration entre hiérarques et clercs en vue du témoignage commun de l’Orthodoxie, de la coordination de leur dialogue avec l’hétérodoxie, avec les autorités civiles et les institutions publiques, et travaillent au développement commun de projets théologiques, éducatifs et missionnaires, collaborant dans les différents domaines de la pastorale. La voix de l’Orthodoxie sera de fait mieux entendue si nous résistons ensemble au laïcisme agressif, si nous défendons ensemble l’idéal moral du christianisme dans un monde contemporent.

Je souhaite sincèrement à chacun des membres de l’Assemblée des évêques orthodoxes de France la grâce et l’aide affermissante de Dieu dans vos efforts communs pour la réalisation de ces sublimes objectifs.

Merci de votre attention.