Le 10 mai 2020, 4e dimanche de Pâques, dimanche du paralytique, le métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou, a célébré la Divine liturgie à l’église moscovite Notre-Dame-Joie-de-tous-les-affligés.

Des prières spéciales ont été dites contre la propagation de l’épidémie de coronavirus.

A la fin de l’office, le métropolite Hilarion a prononcé une homélie.

« Le Christ est ressuscité !

Bon dimanche à tous, chers frères et sœurs !

Nous continuons à fêter la Résurrection du Christ. Le 4e dimanche de Pâques nous faisons mémoire de la guérison du paralytique à la fontaine de Siloé. Un ange du Seigneur descendait régulièrement sur l’eau de la piscine et la troublait : le malade qui entrait le premier dans la piscine après la venue de l’ange était immédiatement guéri, quelle que fût sa maladie.

Un paralytique était couché depuis 38 ans dans cette piscine, car il ne s’était trouvé personne qui aurait pu le descendre dans l’eau au bon moment. Il attendait d’année en année, de décennie en décennie. Sa vie s’était passée ainsi, et il était sans doute déjà âgé quand il rencontra le Seigneur et fut guéri, sans que l’ange descendît, sans que l’eau se troublât. Il suffit d’un mot du Seigneur Jésus Christ, et le paralytique guérit.

Cette lecture de l’Évangile invite chaque année à penser à son âme et à notre façon de répondre à la parole de Dieu, d’examiner si notre âme n’est pas paralysée, comme celle de cet homme. Car il n’était pas seulement paralysé de corps, mais aussi d’esprit, visiblement, car quelle vie est-ce de rester couché sans mouvement durant des années au bord d’une piscine !

Le Seigneur Jésus Christ guérit de toute maladie, de tout mal. Nous qui croyons en Lui, Dieu et Sauveur, le prions de guérir aujourd’hui tous ceux qui sont en danger, dont la vie ne tient qu’à un fil. L’Église prie pour chacun d’eux, elle demande au Seigneur de manifester Sa miséricorde. Aujourd’hui, pendant cette liturgie, nous prions pour tous ceux qui sont malades, à l’hôpital, dont la vie est menacée. Parmi eux, un certain nombre de prêtres, et nous prions nominalement pour chacun d’eux, notamment pour le père Philarète, prêtre de notre paroisse, qui est à l’hôpital dans un état critique, atteint d’une pneumonie.

Nous prions pour tous ceux qui sont frappés par cette maladie et demandons au Seigneur de les faire revenir à la vie, de les aider à supporter leur mal et de montrer à chacun Sa miséricorde.

Malheureusement, le nombre de victimes ne cesse d’augmenter. Nous avons aussi prié aujourd’hui pour les clercs et pour les laïcs qui ont succombé à la maladie. Nous prions le Seigneur de leur pardonner leurs trangressions volontaires et involontaires, et de faire reposer ces âmes au Royaume des Cieux, dans le sein d’Abraham.

Beaucoup se demandent ce qui nous a valu cette épreuve. Dans toute épreuve il faut voir l’action de la Providence divine. Demandons-nous ce que Dieu veut nous dire par là ? Car Il a permis cette épreuve. Peut-être contient-elle un message, adressé à chacun et au monde entier ? Peut-être Dieu veut-il dire aux hommes : arrêtez, pensez à votre âme ! Pensez à ce qui compte vraiment dans la vie, à ce qui vous est le plus cher : la vie de vos proches ou votre propre succès, votre confort ; la vie de vos proches ou votre carrière professionnelle et le gain d’argent.

Le monde vit actuellement soumis à la loi du progrès constant, de l’amoncellement infini de biens matériels. Les hommes oublient la dimension spirituelle de la vie, les commandements de Dieu, la fragilité de leur propre existence et de la vie de leurs proches. C’est ce que le Seigneur veut nous rappeler maintenant : la fragilité de la vie, la nécessité d’être attentif  aux autres, d’une attitude responsable les uns envers les autres.

Il y a quelques semaines, lorsque des mesures de confinement strict ont été introduites à Moscou et dans d’autres villes, l’Église s’y est soumise immédiatement. Nous avons fermé nos églises, tout en continuant à célébrer à huis clos, pour que la prière de l’Église ne cesse pas, pour que vous puissiez y participer au moins grâce à la retransmission en direct des offices. Nous ne pouvez pas imaginer comme il est difficile, pour nous autres, prêtres, de célébrer dans des églises vides. Mais nous sentons votre pésence. Aujourd’hui, en célébrant cette Divine liturgie, j’ai ressenti de tout mon âme, et même physiquement, votre présence, par l’intermédiaire de l’œil de la caméra qui filme notre office. Je sais que beaucoup suivent en direct la célébration, et que certains regardent plus tard l’enregistrement.

Nous sommes séparés par la distance, privés de la possibilité de venir à l’église, de communier aux saints mystères du Christ. Mais cette mesure forcée et temporaire n’est nécessaire que pour que le moins possible de gens soit contaminés par le virus et pour que le plus grand nombre possible ait la vie sauve. Accueillons cette épreuve avec humilité, nous montrant responsables de notre vie et de celle des autres.

Il y en a certains, naturellement, qui ne veulent pas entendre la voix des autorités de l’état, ci celle des autorités sanitaires, ni celle du patriarche. Il y a deux diacres comme cela à Moscou. L’un dit : « Le patriarche Cyrille aurait dû fermer tout de suite toutes les églises, comme l’a fait le patriache Bartholomée, et il n’y aurait pas eu de malades, ni de victimes parmi les clercs ». L’autre diacre, au contraire, déclare que fermer les églises est un crime et que l’état a organisé une persécution contre l’Église encore pire que sous le régime soviétique. Je ne sais pas ce que ce diacre sait du régime soviétique, mais il pense vraiment que l’état persécute l’Église, qu’il faut résister, et que le patriarche s’est rendu à l’état, annulant ainsi dix années de pontificat.

N’écoutez pas ces bêtises diaconales et archidiaconales. Écoutez ce que disent le patriarche, la hiérarchie. Ce n’est pas facile non plus pour le patriarche, de s’isoler, de célébrer dans un ermitage, de ne voir personne. Il a célébrer Pâques à la cathédrale du Christ Sauveur, dans une église vide. Pour nous tous, prêtres, c’est dur, mais nous le faisons pour que les gens aient la vie sauve.

Certains prêtres se sont d’abord montrés assez irresponsables, prenant les paroles du patriarche à la légère : « Il ne faut pas avoir peur du coronavirus, au contraire, témoigner de notre foi, en allant sans crainte à l’église, montrant que nous n’avons pas peur de tomber malades. Ils n’ont pas pensé que la vie de leurs paroissiens dépendait, peut-être, de ce qu’ils viendraient ou non à l’église.

Aujourd’hui, nous sommes, peut-être, au plus fort de cette terrible épidémie. Chaque jour, plus de 10000 personnes sont contaminées. Chaque jour plusieurs dizaines de malades meurent. Il faut bien comprendre que ceux que nous perdons meurent dans des souffrances terribles. Ils sont raccrochés à des appareils de ventilation des poumons, ne peuvent pas dire adieu à leurs proches. Même les prêtres ne peuvent pas aller les voir pour leur donner la communion ou les confesser, parce que, dans la plupart des cas, on ne permet à personne de s’approcher d’eux.

Gardons une attitude responsable les uns envers les autres, veillons à ce qui se passe autour de nous. Obéissons au patriarche, et non pas à des prédicateurs de malheur, même s’ils sont diacres ou prêtres. Prions les uns pour les autres, pour notre patrie, pour le monde entier ; pour nos prêtres et pour les nombreux laïcs qui sont malades en ce moment, raccordés à des appareils de ventilation des poumons, dont la vie ne tient qu’à un fil. Prions pour les défunts, que le Seigneur leur pardonne leurs transgressions volontaires et involontaires et les accueille dans ses demeures célestes.

A vous tous, chers amis, je vous souhaite, malgré, tout la joie pascale et la paix de l’âme. Que le Seigneur visite votre cœur. Empêchés de venir à l’église, efforcez-vous de faire de vos maisons et de vos cœurs des maisons de Dieu. Que le Seigneur ressuscité vive en vos cœurs et dans vos familles. Prions Dieu de nous accorder de survivre à cette épreuve et de revenir à la vie normale. Que le Seigneur tourne vers nous Sa miséricorde et nous garde tous, ainsi que notre patrie et le monde entier. Amen.

Le Christ est ressuscité ! »