Le 30 octobre 2019, Sa Sainteté le patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie a reçu le président de Cuba, Miguel Diaz-Canel Bermudez, à la résidence patriarcale et synodale du monastère Saint-Daniel de Moscou.

Prenaient part à la rencontre, pour Cuba : Bruno Rodriguez Parrilla, ministre des Affaires étrangères ; Rodrigo Malmierca Diaz, ministre du commerce extérieur et des investissements étrangers ; Luis Alberto Rodriguez Lopez-Calleja, conseiller du président de la République de Cuba ; Gerardo Peñalver Portal, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République de Cuba en Fédération de Russie ; pour la Fédération de Russie : A. Gouskov, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la Fédération de Russie à Cuba ; pour l’Église orthodoxe russe : l’archiprêtre Nicolas Balachov, vice-président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou ; l’archiprêtre Serge Zvonariov, secrétaire du DREE en charge des affaires de l’étranger lointain ; le prêtre Andreï Titouchkine, collaborateur du Secrétariat des affaires de l’étranger lointain.

Accueillant le président cubain, le primat de l’Église orthodoxe russe a rappelé que sa première rencontre avec Miguel Diaz-Canel Bermudez datait de septembre 2018, à Moscou. Le patriarche Cyrille a chaleureusement félicité son éminent invité de son élection au poste de président de Cuba.

« Je tiens à exprimer mon sentiment de profonde satisfaction des changements qui se produisent en ce moment à Cuba, a poursuivi le patriarche. Une nouvelle Constitution a été adoptée, qui ouvre de nouvelles possibilités au développement de l’économie. Un système de direction de l’état suffisamment stable a été mis en place. Votre Constitution fait également place aux traditions remontant aux débuts de la révolution cubaine. J’ai en vue le souci de la justice, des pauvres, des opprimés. »

Des changements radicaux dans une société sont généralement gros non seulement de nouvelles possibilités, mais aussi de menaces, a prévenu Sa Sainteté. Selon le primat, l’une de ces menaces est la tentation de rompre totalement avec le passé, et « de dessiner les contours de l’avenir sur une page vierge ».

« La réforme qui se poursuit actuellement dans votre pays n’impose pas de rupture avec le passé héroïque de votre peuple, lié à la lutte pour la libération de Cuba, a remarqué le patriarche Cyrille. Je constate avec satisfaction qu’il reste, dans ce contexte, un espace honorable pour la poursuite de rapports fraternels entre nos peuples et de relations amicales entre nos pays ».

Dans la suite de l’entretien, Sa Sainteté a rappelé être venu à Cuba en 1998, en 2004 et en 2008, alors qu’il était président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou.

En novembre 2004, le métropolite Cyrille de Smolensk et de Kaliningrad avait rencontré pour la première fois le secrétaire du Comité central du Parti communiste de la République de Cuba, Fidel Castro. Durant leur rencontre, il avait été question de construire une église russe à Cuba. Fidel Castro en avait approuvé l’idée. Le principal historien de La Havane, le docteur Eusebio Leal avait recommandé de concéder à cet effet un terrain dans la partie historique de la ville, la Sainte Havane.

C’est le 19 octobre 2008 que l’église Notre-Dame-de-Kazan a été consacrée. Le métropolite Cyrille avait présidé le rite de la consécration majeure, concélébrant avec des archipasteurs et des pasteurs du Patriarcat de Moscou et de l’Église russe hors-frontières.

« Cette église est aujourd’hui un lieu de rencontre pour les Russes, des touristes et des pèlerins toujours plus nombreux viennent la visiter, elle est devenue célèbre et tous les prospectus touristiques la recommandent aux visiteurs de la La Havane » a constaté le patriarche Cyrille.

En 2016, le patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie avait effectué une visite pastorale dans les pays d’Amérique latine. Le premier pays où il s’était rendu avait été Cuba. Sa Sainteté a témoigné que l’actuel commandant en chef des armées de Cuba, Raul Castro, avait participé à de nombreuses manifestations, ce qui avait permis au patriarche de mieux le connaître, grâce à de longs entretiens hautement constructifs. Le patriarche avait pu également découvrir la vie du peuple cubain et de la communauté orthodoxe de Cuba.

« Le point culminant de cette visite avait bien sûr été ma rencontre avec le pape François de Rome, a souligné le patriarche Cyrille. Comme je l’ai dit au pape pendant notre rencontre, nous avions choisi le bon moment et le bon endroit. Cuba nous fournissait des conditions idéales pour cette rencontre historique, comme il n’y en avait jamais eu auparavant. Dans une ambiance totalement neutre, à l’aéroport de La Havane, nous avons échangé fraternellement pendant deux heures. Nous avons soulevé des questions très importantes. Le résultat de cette rencontre a été l’introduction du terme « génocide des chrétiens » dans le vocabulaire international, génocide qui est actuellement en cours, notamment dans les pays d’Afrique, mais pas seulement. En Occident, on évitait d’employer le terme de génocide à propos de ce phénomène, mais depuis qu’il a été fixé dans notre déclaration, le Congrès des États-Unis s’est mis à l’employer. »

Pendant leur rencontre à La Havane, le patriarche Cyrille et le pape François ont aussi parlé des problèmes de la lutte contre le terrorisme et d’autres thèmes, notamment de la situation en Ukraine.

« Notre message à l’Ukraine, notre appel à la solidarité et à la paix a été très important. Le pape de Rome, comme le patriarche de Moscou ont déclaré clairement et nettement leur opinion sur la crise ukrainienne. La participation de l’Église à des évènements de ce genre ne doit pas aggraver les confrontations entre personnes. »

Selon le patriarche Cyrille, l’Église doit atténuer les contradictions et aider à trouver un compromis. « L’Église orthodoxe russe et l’Église catholique romaine s’en tiennent aujourd’hui à cette position, a déclaré Sa Sainteté. Malheureusement, nous ne pouvons pas en dire autant des gréco-catholiques d’Ukraine, qui non contents de prendre une part active au conflit civil, en sont aussi les inspirateurs. Mais je pense que nous ne sommes pas les seuls à avoir des ennuis avec les gréco-catholiques, le pape François a aussi du mal avec eux, parce que ce groupe est difficile à manœuvrer. »

Selon le primat de l’Église orthodoxe russe, la déclaration commune adoptée à la fin de la rencontre « a posé les bases d’actions communes des deux Églises, face aux problèmes qui inquiètent aujourd’hui la majorité des gens dans le monde. »

« Je tiens à ajouter que je suis heureux des changements qui se poursuivent dans la vie des Cubains. Je suis profondément convaincu que ces changements permettront, notamment, de contribuer à une hausse de la vie religieuse dans votre pays, car la vie religieuse tient une part importante dans le quotidien du peuple. En tant qu’Église, nous soutenons le développement ultérieur des relations entre la Russie et Cuba dans tous les domaines possibles, notamment dans le domaine de l’esprit humain », a conclu le patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie.

De son côté, le président cubain, Miguel Bermudez, a remercié le primat de l’Église orthodoxe russe de l’avoir accueilli, et a transmis à Sa Sainteté les salutations du commandant en chef des forces armées de Cuba, Raul Castro.

« Votre visite à Cuba en 2016 a laissé les meilleures impressions » a dit Diaz-Canel. Le chef de l’état a affirmé que c’était un grand honneur pour toute la région latino-américaine que la rencontre historique de Sa Sainteté le patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie avec le pape François de Rome ait eu lieu à Cuba, pays d’Amérique latine.

Il a aussi témoigné que l’église russe de Cuba, bâtie en signe d’amitié entre les peuples peuples, avait une très grande importance spirituelle et culturelle.

« Nous voulons continuer à consolider les liens entre le Patriarcat de Moscou et l’état cubain. Nous sommes très satisfaits de l’état actuel de nos relations bilatérales, et aspirons à les développer. Ces relations sont le symbole de l’amitié entre les peuples russe et cubain » a conclu Miguel Bermudez.

Des cadeaux ont été échangés à la fin de la rencontre.