Le 10 février 2019, 37e dimanche après la Pentecôte, le métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou, a célébré la Divine liturgie à l’église Notre-Dame-Joie-de-tous-les-affligés, rue Bolchaïa Ordynka, à Moscou.

Après la litanie instante, le métropolite Hilarion a lu la prière pour la paix en Ukraine.

A la fin de la Liturgie, Mgr Hilarion a prononcé une homélie :

« Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit !

Chers pères, frères et sœurs,

Nous avons aujourd’hui lu l’évangile du publicain Zachée qui monta sur un figuier pour mieux voir Jésus Christ. Ce passage ouvre la préparation au Grand Carême, qui commencera dans quatre semaines.

Ce même dimanche, nous célébrons la mémoire des Nouveaux martyrs et confesseurs de l’Église russe, qui coïncide cette année avec celle de deux grand saints syriaques, saint Ephrem et saint Isaac.

L’évangile d’aujourd’hui nous parle d’un homme peu connu et peu remarqué, comme il y en avait beaucoup en Judée à l’époque de Jésus Christ. Si Zachée n’était pas monté sur le figuier pour voir passer Jésus, le monde n’aurait jamais rien su de lui. Mais l’évangile nous a rapporté le récit de cet évènement et le nom du publicain.

Zachée monta sur l’arbre avec le désir de voir Jésus et de comprendre qui Il était. La question de l’identité de Jésus a occupé et occupe beaucoup d’esprits, depuis le moment où le Christ commença à prêcher et jusqu’à aujourd’hui. On entend les affirmations les plus variées sur Jésus Christ, toute une littérature dispute la question, il paraît sans cesse de nouveaux livres à ce sujet. Régulièrement il se publie des livres qui font les gros titres : « Enquête sensationnelle, nouveaux faits sur Jésus Christ ». Comme si le lecteur allait apprendre toute la vérité sur cet Homme, comme si l’Église n’avait pas connu auparavant la vérité sur Jésus Christ, sur sa doctrine, sur ce qu’il enseignait.

Certains continuent même à affirmer sérieusement que c’est l’apôtre Pierre qui fonda l’Église, qui « inventa » la divinité de Jésus Christ, qui le fit passer pour Sauveur et créa ainsi toute une théologie autour de Sa personne.  En fait, disent-ils, le Christ était un prédicateur comme il y en avait beaucoup à l’époque en Judée. Certains disent aussi que le Christ était un prophète de miséricorde, tandis que d’autres Le présentent comme un prophète de haine.

Toutes ces opinions, dites et redites, paraissent et réapparaissent dans des documentaires, dans des livres ou des articles, dans des études qui tentent de convaincre qu’on a autre chose à dire sur Jésus Christ que ce qu’en dit l’Église. Beaucoup vont même jusqu’à affirmer que l’Église a créé sa propre image de Jésus Christ, alors qu’il aurait été tout différent.

Il n’y a là rien que de très naturel, car la personnalité de Jésus Christ est si attrayante que même ceux qui ne savent rien de Lui, ne comprennent pas quel était cet Homme, pourquoi Il vécut et ce qu’Il enseignait, désirent malgré tout approcher cette Personne et en dire quelque chose. C’est pourquoi les gens ne cessent de se pencher sur cette question : qui était Jésus Christ ?

C’est aussi la question à laquelle cherchait à répondre Zachée. Le moyen qu’il choisit pour trouver la réponse est cependant très simple, voire même un peu comique, sans qu’il craignît qu’on se moquât de lui. Un homme de petite taille peut faire ironiser à son sujet, être l’objet de moqueries. Or, sous les yeux de tout le monde, il grimpa à l’arbre, sans penser combien sa position pouvait sembler ridicule. Zachée cessa de se préoccuper de ce qu’on pouvait penser de lui. Il avait tout oublié, seule une chose comptait pour lui : voir le Christ et répondre à la question qu’il se posait : qui est-Il ? Pourquoi les foules L’entourent-elles ? Par quelle force guérit-Il ? Qu’enseigne-t-Il ?

Le plus important dans l’histoire de Zachée se produit lorsque le Christ, passant près de l’arbre, le remarqua. Or, le Christ était loin de s’arrêter souvent pour remarquer une personne de la foule. Ici, voyant ce petit homme grimpé à l’arbre pour Le voir, le Christ s’arrêta, l’appella par son nom et dit : « Il faut que je demeure aujourd’hui dans ta maison » (Lc 19,5).

Entendant ces paroles, Zachée descend vite et accueille avec joie le Seigneur Jésus Christ. Lorsque le Christ se trouve chez lui, il est si heureux que le Seigneur l’ait visité, qu’il dit : « Voici, Seigneur, je donne aux pauvres la moitié de mes biens, et, si j’ai fait tort de quelque chose à quelqu’un, je lui rendrai le quadruple » (Lc 19,8).

N’oublions pas que Zachée était publicain, c’est-à-dire quelqu’un qui passait sa vie à compter de l’argent et connaissait parfaitement la valeur de ses biens. Il ne dit pas à Jésus qu’il distribuera tous ses biens, il promet d’en donner la moitié. Quant à ceux auxquels il aurait fait tort, il veut leur rendre au quadruple. Pas au quintuple, pas au centuple. Cela veut dire qu’avant de faire ce vœu au Seigneur, il a compté ce qu’il aurait à donner et ce qu’il resterait. Le Seigneur le loue de ses paroles, de son intention, de sa décision de se corriger.

On se souvient du jeune homme qui demanda au Sauveur : « Que dois-je faire pour avoir la vie éternelle ? » (Lc 18,18). Le Seigneur énuméra tous les commandements de l’Ancien Testament, et le jeune homme de répondre : « J’ai observé cela depuis ma jeunesse ». Alors le Seigneur lui dit : « Va, vends tout ce que tu as et donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans les cieux. Puis viens, et suis-moi » (Lc 18,22). Alors le jeune homme s’en fut tout triste, car il était riche et comprenait qu’il n’aurait pas la force de tout donner.

Zachée, lui, pour recevoir du Seigneur le salut, n’avait besoin que de donner la moitié de ses biens. Cela signifie que le Seigneur tient compte des bonnes intentions et n’attend pas que chacun se donne entièrement à Lui, car chacun répond à l’appel de Dieu et Le suit à la mesure de ses possibilités. Chacun répond différemment à cet appel : certains sont prêts à donner non seulement tous leurs biens, mais aussi leur vie, d’autres ne sont prêts à donner que la moitié de leurs biens. L’un dit : « Je verserai la dîme et servirai Dieu de cette manière », tandis qu’un autre déclare : « Je ne dilapiderai pas mes richesses, mais j’utiliserai mon temps, mes capacités, mes talents, à faire le bien ». Le Seigneur accueille chacun avec amour. Il a besoin d’apôtres qui laissent tout pour Le suivre, de publicains prêts à donner la moitié de leurs biens, et de gens qui, peut-être, sont capables de moins, mais veulent, malgré tout, être avec le Christ.

Que le récit de l’évangile de Zachée nous apprenne que même l’homme le plus petit, le plus insipide, a de la valeur aux yeux de Dieu, et que la bénédiction de Dieu peut se déserver sur lui non seulement en récompense des bonnes œuvres qu’il aura accomplies, mais aussi en réponse aux bonnes intentions exprimées par cette personne lorsque le Christ la visita.

L’Évangile ne dit pas ce qui se passa ensuite : on ne sait pas si le publicain distribua ses biens, s’il rendit à ceux auxquels il avait fait tort… On sait seulement que la seule expression de son intention suffit pour que le Seigneur lui dise : « Le salut est entré aujourd’hui dans cette maison » (Lc 19,9). Remarquons ces paroles : « Le salut est entré aujourd’hui dans cette maison ». Non pas lorsque le publicain distribuera la moitié de ses biens ou rendra le quadruple à ceux qu’il avait offensés, mais aujourd’hui. Pourquoi ? Parce que le Christ était à ce moment dans sa maison et que Zachée, de tout son cœur et avec toute son âme, répondit à Sa présence.

Vous et moi avons depuis longtemps trouvé la réponse à la question : qui est Jésus Christ ? Il est le Dieu incarné, le Sauveur du monde, le Dieu homme. Il est venu dans le monde pour chacun de nous, il est mort pour nos péchés et est ressuscité pour notre salut. Répondons donc encore et encore à Son appel à faire le bien, aux œuvres de charité et de miséricorde, pour devenir enfants de Dieu et suivre la voie du salut. Amen. »