Le 21 juin 2015, le métropolite Hilarion de Volokolamsk, animateur de l’émission « L’Église et le monde » sur la chaîne « Rossia-24 », recevait Natalia Yakounina, président du Conseil de tutelle du programme national « Sainteté de la maternité ».
Le métropolite Hilarion : Frères et sœurs, bonjour. Vous regardez l’émission « L’Église et le monde ». Nous parlerons aujourd’hui de la maternité et de l’enfance. Notre invité est Natalia Viktorovna Yakounina, président du Conseil de tutelle du programme national « Sainteté de la maternité ». Bonjour, Natalia Viktorovna !
N. Yakounina : Bonjour, Monseigneur ! L’objectif du programme « Sainteté de la maternité » est de restaurer le potentiel spirituel et moral de la famille russe, de faire de la famille une valeur très élevée aux yeux de la société. Pour réaliser nos objectifs, nous avons initialisé différents projets, dont le principal est le projet « Tu n’es pas seule », qui assure une aide psychologique aux femmes enceintes afin de prévenir une interruption de grossesse.
Dès les débuts du programme, nous avons estimé nécessaire de nous appuyer sur toutes les forces de la société. La Fondation Saint-André et le Centre de gloire nationale ont toujours étroitement collaboré avec l’Église orthodoxe russe. Car notre Église a toujours été prête à aider les familles dans le besoin et les femmes enceintes, il y a 20 ans à l’époque des bouleversements économiques.
L’Église a par ailleurs une grande expérience d’aide sociale. Les premiers centres de protection de la maternité ont aussi été créés par l’Église. Pour la réalisation de notre programme dans des régions concrètes, nous passons des accords avec l’administration régionale, dont le soutien est essentiel à la réalisation de nos objectifs. Nous comptons aujourd’hui 22 partenaires. Le Tatarstan nous a récemment rejoints, et le prochain forum de notre programme aura justement lieu à Kazan.
Depuis le début, nous avons élaboré une méthode pour la formation de psychologues spécialisés dans la consultation pré-avortement, dans la mesure où il faut un spécialiste pour assurer l’aide médico-psychologique des femmes enceintes. Notre méthode a reçu l’approbation du ministère de la Santé. Deux fois par ans, nous organisons des séminaires pour les psychologues des régions partenaires.
Le métropolite Hilarion : Le programme que vous menez à bien depuis près de dix ans englobe de nombreuses régions de la Fédération de Russie. Nous comprenons bien que l’ampleur des problèmes dépasse les forces conjuguées de l’Église et d’organisations comme la Fondation « Sainteté de la maternité ». Pour retourner la situation, il faudrait changer les mentalités des gens. Mais il faut pour cela que s’unissent toutes les forces saines de la société.
Depuis plusieurs décennies, l’image de la famille est détruite dans les mentalités. La représentation même des valeurs familiales, de la sainteté de la famille et de la maternité est altérée. Lorsque nous feuilletons, disons, une revue féminine, nous ne trouvons aucune page sur la famille, la maternité, la protection de l’enfance. C’est un tout autre idéal de la femme qui est proposé : sexy, physiquement attrayante ; tout ce qui ressort du domaine familial est rejeté au second plan, voire totalement absent.
Les revues illustrées, les agences publicitaires et bien d’autres forces manipulent la mentalité féminine. Et cela commence lorsque la personnalité de la jeune fille n’est pas encore formée. Bien plus, les revues trompent les jeunes filles quant à la réalité qui les entoure, et, lorsqu’elles mûrissent et pourraient mettre un enfant au monde, elles sont confrontées à de nombreux problèmes. Le principal est que la plupart des lectrices, selon elles, ne correspondent pas à l’image de la femme moderne présentée dans les journaux, ce qui provoque une tension psychologique, voire un stress.
En dehors des canons de la beauté extérieure, les images véhiculées par la publicité imposent des modèles de comportement et d’échanges assez primitifs. Les jeunes gens se persuadent que les relations superficielles, sans profondeur, sont normales. Beaucoup de jeunes filles ne se rendent pas compte de ce qu’est l’avortement et de quelles terribles conséquences, physiologiques, morales, spirituelles il est la cause. Interviennent ensuite les problèmes relatifs à la faible protection sociale des femmes enceintes.
Il faut dénouer le nœud gordien que représente cet ensemble de problèmes, et nous nous en occupons vous et moi.
N. Yakounina : J’ai souvent discuté avec des éducateurs d’école maternelle. Ils racontent que les petites filles jouent moins au « papa et à la maman » mais de plus en plus souvent à la « femme d’affaires » ou au « mannequin ». C’est une effroyable transformation, qui intervient dès l’âge de 5 ans.
C’est pourquoi dans le cadre de notre programme, nous avons jugé nécessaire de favoriser l’introduction de cours sur les bases morales de la vie familiale, sur l’éthique familiale afin que l’enfant soit dès son plus jeune âge incité à fonder une famille. Heureusement, nous avons trouvé du soutien. Nous collaborons avec l’Académie d’instruction russe. Nous nous sommes adressés au ministère de l’Instruction pour la mise en place d’un groupe de travail pour l’élaboration de ce cours.
Il faut dire que des cours semblables existent déjà dans les régions. Ils sont facultatifs, mais il me semble qu’il faudrait justement un cours obligatoire faisant partie du cursus scolaire.
Le métropolite Hilarion : « Il est très important de défendre les petites filles, les jeunes filles et les femmes de toutes ces manipulations, car, comme vous l’avez fort justement constaté, la manipulation de la mentalité commence dès l’école maternelle. Cela se poursuit à l’école, et ensuite dans les établissements d’enseignement supérieur. L’introduction de normes et de modèles de comportement allant pour une bonne part à l’encontre des standards établis dans notre société depuis des années, s’effectue par le biais de la publicité, ainsi que par le système éducatif et par le système de rapports entre jeunes gens.
La Fondation Saint-Grégoire-le-Théologien, dont je suis le président, a entamé récemment un programme « Sauvons la vie ensemble », que nous voulons appliquer à grande échelle. En dehors du droit des femmes, du droit des enfants ou de toute autre couche de la société, tout homme a le droit de naître. Avant tout, nous devons faire comprendre aux femmes qu’elles sont manipulées. Nous voulons les libérer de ces manipulations, faire renaître l’aspiration naturelle à la maternité que seules des manipulations de mentalité ont pu extirper de la conscience féminine.
N. Yakounina : Tout à fait d’accord avec vous. Je suis très heureuse que de nouvelles organisations et fondations œuvrent sur ce terrain : plus nous aurons de compagnons d’armes, mieux cela vaudra. En créant notre programme, nous nous sommes orientés sur la formation d’un réseau d’associations qui se soutiendraient les unes les autres. C’est pourquoi nous organisons chaque année un forum « Sainteté de la maternité », auquel sont invités les représentants de toutes les associations occupées de ce problème.
Le métropolite Hilarion : Vos entreprises sont largement soutenues, elles s’incarnent également dans d’autres initiatives parallèles réalisées ensuite conjointement.
Lorsque nous parlons de l’avortement comme d’une tragédie nationale, nous comprenons bien que la plupart des avortements sont le fait de jeunes filles qui, pour différentes raisons, n’étaient pas prêtes à une grossesse. Ce n’est un secret pour personne que les jeunes gens ont des relations sexuelles de plus en plus tôt, sans réfléchir aux conséquences. Lorsqu’intervient une grossesse non désirée, la plupart des jeunes filles avortent devant l’insistance de leurs partenaires qui leur déclarent : « Nous ne sommes pas prêts à fonder une famille, nous n’avons pas d’appartement, pas de moyens financiers, il faut se débarrasser de cet enfant ». Les parents manipulent aussi leurs filles : « Comment donc, tu vas te couvrir de honte, tu n’es même pas mariée, qui voudra de toi avec un enfant ? »
Malheureusement (j’en ai souvent parlé dans cette émission), les médecins font également pression sur les futures mamans. La jeune femme arrive en consultation pour se faire aider à conserver son enfant, et la première question qu’on lui pose est « Tu n’as pas besoin de ça. Ce ne serait pas plus simple de se débarrasser du fœtus ? » Ensuite on lui fait peur ; sur la base des résultats d’analyses, on lui dit « Tu auras un enfant malade, il sera trisomique, tu dois t’en débarrasser pendant qu’il est encore temps ». Pourtant, elles mettent au monde des enfants en parfaite santé, solides. Pourquoi les médecins ont-ils donc ce désir de manipuler les jeunes filles et les femmes ?
N. Yakounina : Des médecins se sont adressés à nous, nous demandant d’organiser des séminaires pour les gynécologues et, plus généralement pour tous les employés du monde de l’obstétrique. Depuis deux ans, nous organisons des séminaires à l’Académie de médecine de Smolensk, pour aider à la formation d’une éthique médicale sur le problème de l’avortement.
Le métropolite Hilarion : Notre programme « Sauvons la vie ensemble » a ouvert une ligne téléphonique ; toute jeune femme peut appeler et parler de ses problèmes, elle sera entendu par des psychologues professionnels. Mais nous ne nous limitons pas à exhorter, nous apportons une aide matérielle concrète aux futures mamans pour qu’elles conservent leur enfant.
Et nous voyons que beaucoup de jeunes filles ont envie de garder leur bébé, de lui donner la vie, parce qu’elles portent en elle une aspiration naturelle à la maternité. Je connais le directement du moteur de recherche « Yandex ». Il m’a dit que le mot que les femmes cherchent le plus souvent est « enfant ». Comment l’expliquer ? Inconsciemment, nos jeunes filles ont envie d’avoir des enfants.
N. Yakounina : Vous savez, Monseigneur, nous avons effectué un sondage à Krasnoïarsk. Nous voulions comprendre les raisons qui poussent les femmes à avorter. Le manque de soutien du mari ou du concubin venait en première position. Si l’on aide la jeune fille au bon moment, elle mettra au monde un enfant, un nouveau citoyen pour notre pays.
Le métropolite Hilarion : Nous devons travailler aussi avec les hommes qui ont volontiers des relations sexuelles, mais ne veulent pas ensuite reconnaître leur responsabilité. Je pense que les règles de reconnaissance de la paternité devraient être changées. On ne peut pas, actuellement, obliger un homme à passer un test de paternité. Mais puisque l’enfant a un père biologique, celui-ci doit assumer sa responsabilité, indépendamment du fait qu’il désirait ou non cet enfant. Nous devons travailler avec les législateurs, afin que la procédure de reconnaissance de la paternité soit allégée.
De nos jours, les femmes sont soumises à un système de manipulations mis en œuvre, malheureusement, principalement par des hommes. Ce sont généralement des hommes qui sont à la tête des revues féminines. Les hommes font, excusez-moi, les proxénètes. Ils corrompent les consciences des jeunes femmes. C’est pourquoi je pense que nous devons être plus sévères envers les hommes et plus indulgents envers les femmes. Ensemble, nous devons tout faire pour qu’aucun enfant à naître ne soit privé de cette possibilité. Le doit à la naissance doit être fixé comme droit imprescriptible de tout être humain.
N. Yakounina : Bien sûr. Bien que notre programme s’appelle « Sainteté de la maternité », nous travaillons beaucoup sur la paternité ces dernières années. L’an dernier, nous avons organisé une magnifique manifestation : une course à moto depuis Vladivostok jusqu’à Moscou sous la devise : « Les pères russes pour la famille nombreuse ».
Nous prévoyons de continuer à travailler sur la paternité. Hier, nous avons appris que la Douma avait organisé des auditions en vue d’introduire une fête des pères. C’est une initiative à soutenir, et je pense qu’elle peut avoir un rôle positif.
Le métropolite Hilarion : Merci Natalia Viktorovna de tout ce que vous faites. J’aimerais que chaque citoyen de notre pays connaisse le nom de votre organisation « Sainteté de la maternité », pour que chacun sache que maternité rime avec salut et sainteté, que la maternité est un exploit.