Le métropolite Hilarion : « En tant que recteur, je considère essentiel de faire personnellement connaissance avec nos futurs étudiants »
Du 3 au 7 septembre 2012 auront lieu les examens d’admission à l’École doctorale Saints-Cyrille-et-Méthode. Dans une interview à la version électronique du journal Tatianin den’, le métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou et recteur de l’École doctorale a expliqué pourquoi il s’entretient avec chaque futur étudiant, ce qu’il attend d’eux et quelles sont les perspectives de collaboration internationale de l’École.
– Éminence révérendissime, les examens d’admission à l’École doctorale Saints-Cyrille-et-Méthode commenceront le 3 septembre. L’un de ces examens consiste en un entretien avec vous-même. Qu’attendez-vous en particulier des candidats ? Comment, en quelques minutes d’entretien, parvenez-vous vous rendre compte si un étudiant est prêt ou non à entrer à l’École doctorale ? Qu’est-ce que cet entretien doit avant tout mettre en évidence ?
– L’entretien avec le recteur est la dernière étape des épreuves d’admission. Les candidats ont déjà passé tous les examens, ils ont fait preuve de leurs connaissances, de leurs aptitudes, de leur érudition. Le jury me communique ses recommandations pour ou contre l’admission de ceux qui postulent chez nous. Mais cela ne veut pas dire que l’entretien n’est qu’une formalité. En tant que recteur, je considère essentiel de faire personnellement connaissance avec nos futurs étudiants, de les entendre et de les voir. Leurs connaissances, leurs capacités, leur intellect, leur culture, leur valeur académique, tous ces éléments sont nécessaires à l’admission à l’École doctorale. Nécessaires, mais insuffisantes en soi. Nous devons être certains que ce sont des gens prêts à servir l’Église qui postulent chez nous, spirituellement et moralement mûrs, motivés, sachant à quelles difficultés ils peuvent être confrontés et prêts à assumer ces difficultés. L’entretien est en fait une discussion autour du projet d’avenir des candidats. Il importe que nous ne trompions pas dans notre choix. Mais il importe aussi que le choix des candidats soit également le bon, pour que leurs études leur soient profitables intellectuellement et spirituellement.
– Vous avez souvent parlé de l’importance et même de la nécessité de la connaissance des langues étrangères. Pourtant, au moment où ils passent les épreuves d’admission, tous les candidats sont loin d’avoir un niveau suffisant en langues étrangères et d’autant plus en langues anciennes. Un étudiant dont le niveau de langue étrangère ne serait pas suffisant mais qui serait sincèrement désireux d’apprendre peut-il espérer être admis ?
– En effet, une bonne connaissance des langues, anciennes et contemporaines, est une condition importante à l’admission à l’École doctorale. Le travail de recherche d’un théologien est aujourd’hui pratiquement impensable sans, d’une part, le recours aux sources chrétiennes et, d’autre part, la connaissance de l’état de la science théologique dans le monde, ce qui suppose la maîtrise des langues anciennes et des langues européennes. Nous choisissons des étudiants en master, en thèse et en doctorats (suivant le système occidental et suivant le système russe). Cela veut dire que les candidats doivent avoir atteint le niveau de master ou, au moins, de bachelier en théologie. Il est absolument impensable que quelqu’un qui souhaite rédiger un mémoire, disons en sciences bibliques, ne connaisse pas l’hébreu ou qu’un étudiant en patristique grecque ne sache pas le grec.
En même temps, nous avons une approche différentielle. Disons que nous ne sommes pas si exigeants sur la connaissance des langues anciennes envers ceux qui s’apprêtent à suivre le programme de master en relations ecclésiastiques extérieures ou prévoient de rédiger un mémoire sur l’histoire russe. Mais nos exigences concernant la connaissance des langues contemporaines (en général l’anglais, mais aussi, dans certains cas, l’allemand ou le français), sont les mêmes pour tous et les candidats doivent démontrer leur niveau de connaissance d’après les normes du baccalauréat d’état. Nous faisons tout notre possible pour donner aux étudiants la possibilité d’améliorer leur niveau de langue et d’étudier de nouvelles langues (nouvelles ou anciennes). Exceptionnellement (mais à la condition de passer d’autres examens) nous admettons certains étudiants dont le niveau de langues n’est pas suffisamment élevé, mais qui s’engagent à progresser en une année.
– L’École doctorale est étroitement liée au Département des relations ecclésiastiques extérieures. Peut-on dire qu’elle prépare les futurs cadres du Département ? Quelles sont les perspectives d’emploi de ceux qui terminent leurs études à l’École doctorale ?
– L’École doctorale possède en effet une faculté des relations ecclésiastiques extérieures que je dirige personnellement. C’est une faculté unique en son genre, qui n’existe dans aucun autre établissement de l’Église orthodoxe russe. Les étudiants approfondissent le ministère extérieur du Patriarcat de Moscou sous ses différents aspects, ils étudient également les langues étrangères, les relations internationales, la politique mondiale, l’histoire et la théorie de la diplomatie, le protocole ecclésiastique et civil. La faculté est un espace scientifique où sont étudiés les problèmes d’actualité des relations interchrétiennes, le dialogue interreligieux.
Toutes ces connaissances sont utiles au DREE. Les étudiants, en dehors des conférences théoriques, reçoivent une formation pratique au sein des différents secteurs du Département. Ils ont ainsi la possiblité d’observer de l’intérieur le fonctionnement d’un établissement ecclésiastico-diplomatique, d’y participer. Au cours de ces stages, nous examinons comment les étudiants travaillent, à quel point ils remplissent efficacement les obédiences qui leur sont confiées, nous voyons s’ils sont capables de remplir eux-mêmes certaines charges.
L’activité du Département des relations extérieures s’élargit et couvre des directions toujours nouvelles. Nous avons besoin de forces nouvelles, de jeunes gens calés en disciplines théologiques et humaines, connaissant les langues étrangères. Ceux de nos étudiants ayant acquis le niveau nécessaire de préparation et faisant preuve d’un désir sincère de servir l’Église dans le domaine des relations extérieures ont des chances d’être employés au Département.
– Les enseignants de l’École doctorale sont de bons spécialistes chacun dans son domaine, beaucoup enseignent ailleurs et sont très occupés. L’École doctorale n’est donc pas leur seul lieu de travail, les étudiants servent ou célèbrent parfois dans des paroisses. Comment une formation véritable est-elle possible si les deux « partis » ont d’aussi lourdes charges ?
– Depuis l’ouverture de l’École, le nombre d’enseignants dont le lieu de travail principal est notre établissement a augmenté. Les autres se consacrent également plus à l’École pour des raisons objectives : nous avons plus d’étudiants et plus de programmes. Nous avons fait en sorte d’augmenter les salaires de nos employés, de mettre en place des primes, mais personne ne peut naturellement empêcher nos enseignants de collaborer avec d’autres établissements d’enseignement ou de recherche.
Parmi nos étudiants, on compte de nombreux clercs et laïcs venus des régions, souvent des métropoles et des diocèses où fonctionne un séminaire. Les cadres que nous formons, qui ont étudié avec d’excellents spécialistes deviennent aptes, une fois de retour dans leur diocèse, à initier une amélioration du travail intellectuel et scientifique au sein du clergé local.
L’École doctorale s’efforce d’aider les jeunes gens talentueux, le clergé et les laïcs de notre Église, y compris de résoudre le problème de la trop grande charge de travail afin qu’il reste du temps pour la recherche. Je pense que les mesures que nous avons prises permettent de mettre en place de façon satisfaisante le processus d’enseignement et de recherche.
– Avec quels établissement collabore l’École doctorale et quelles possibilités offrez-vous, de stage à l’étranger ou d’études à l’étranger, par exemple ?
– Aujourd’hui, l’École doctorale collabore activement avec certains grands établissements en Russie et à l’étranger. Nous avons signé des conventions avec l’Université d’état des sciences humaines de Russie, avec l’Université linguistique moscovite d’état, avec l’Université d’état des sciences sociales de Russie, avec l’Académie chrétienne des sciences humaines de Russie. Nous travaillons activement à créer un programme de maîtrise comun avec la faculté de philosophie de l’Université d’état de Moscou.
Je souligne que notre objectif n’est pas de signer le plus grand nombre possible de conventions. Ce n’est pas un but en soi. Ce qui m’intéresse, c’est la qualité de ces conventions. Il s’agit avant tout d’un échange de professeurs, d’un échange d’étudiants, c’est-à-dire de permettre aux étudiants de suivre une formation en même temps dans deux établissements. Nous devons partager ce que nous avons de meilleur et avoir accès à ce que nos amis et nos partenaires ont de meilleur à offrir. Le résultat en sera un enseignement de qualité et une grande qualification professionnelle.
Nous nous inspirons du même principe pour mettre en place des contacts internationaux. Le programme à l’ordre du jour n’est pas d’envoyer simplement des étudiants en stage à l’étranger, mais de les diriger vers des établissements concrets et des enseignants concerts, leur demandant de remplir des objectifs concrets. Une approche personnelle est nécessaires. Il faut organiser au mieux la formation d’un étudiant talentueux pour que dans la sphère qu’il a choisie il ait accès aux dernières et aux meilleures réalisations de la science théologique, qu’il devienne un scientifique de qualité, un spécialiste et un collaborateur qualifié.
C’est pourquoi nous accordons une attention particulière à la formation des étudiants de l’École doctorale à l’étranger. Nos étudiants sont régulièrement envoyés à l’Université de Fribourg, nous collaborons avec l’Université libre d’Amsterdam, avec la Fodnation de recherche d’Europe centrale et orientale Saint-Adalbert (Hongrie). Nous cherchons à envoyer et envoyons nos étudiants en Grande-Bretagne, Italie, Allemagne, Grèce et dans d’autres pays. Avec la bénédiction du Patriarche Cyrille et sous ma direction, une Commission travaille à sélectionner des étudiants de tous les établissements religieux de l’Église orthodoxe russe pour une formation à l’étranger.
Propos recueillis par O. Bogdanova