Le 15 février 2020, en la fête de la Sainte Rencontre de Notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ, le métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou, a célébré la Divine liturgie à l’église Notre-Dame-Joie-de-tous-les-affligés, rue Bolchaïa Ordynka, à Moscou.

Après l’ecténie instante, le métropolite Hilarion a lu la prière pour la paix en Ukraine.

A la fin de l’office, Monseigneur a prononcé une homélie.

« Au nom du Père, et du Fils et Saint-Esprit !

Chers frères et sœurs,

En la fête de Sainte-Rencontre, nous faisons mémoire d’un évènement raconté par l’Évangile selon saint Luc. Le 40e jour après la naissance, les parents apportèrent l’enfant Jésus au temple de Jérusalem, où, en tant que premier-né, ils devaient le présenter à Dieu (Lc 2,22). Joseph et Marie furent accueillis par le vieillard Siméon, et l’évangile rapporte les paroles qu’il prononça en voyant l’enfant, dans lequel il reconnut le Messie, né pour le salut non seulement du peuple d’Israël, mais de toutes les nations. On apprend aussi que la prophétesse Anne glorifia Dieu, ayant été trouvée digne de voir le Divin enfant.

La fête de la Sainte Rencontre est célébrée le 40e jour après la Nativité du Christ, et nous rappelle l’évènement rapporté par l’évangéliste Luc. Mais cette fête est aussi un rappel de bien d’autres vérités. Elle nous dit quel prêtre et quel grand-prêtre devait devenir le Seigneur Jésus Christ. Comme dit saint Paul dans son épître aux Hébreux, le Christ est devenu grand-prêtre selon l’ordre de Melchisédech.

Ceux qui lisent et entendent ces paroles ne comprennent pas toujours de quoi il s’agit. Le sacerdoce, dans l’Israël antique, était héréditaire. Les fils de prêtres devenaient prêtres à leur tour. Non seulement le sacerdoce était héréditaire, mais aussi l’ordre du sacerdoce : seul un membre d’une famille de grands-prêtres pouvait devenir grand-prêtre à son tour ; devenait prêtre le fils d’un prêtre, tandis que les ressortissants de familles de lévites, de portiers et d’autres serviteurs du temples occupaient des fonctions moindres dans la hiérarchie. Ainsi, le sacerdoce se transmettait de père en fils aux membres de la tribu de Levi. C’est cette tribu qui avait été choisie pour servir au temple de Jérusalem.

Jérusalem était l’unique lieu où étaient célébrés les services religieux et où s’effectuaient les sacrifices en Israël. Au moment de l’incarnation du Seigneur Jésus Christ, le temple de Jérusalem était une immense usine de services rituels : on y vendait du bétail pour les sacrifices, on y changeait de l’argent, on y marchandait, et des sacrifices y étaient perpétrés en permanence. Les gens affluaient de toute la Palestine vers le temple de Jérusalem pour participer aux sacrifices. Certains venaient une fois l’an, d’autres, peut-être plus pieux, plusieurs fois par an. On se souvient de l’épisodede Jésus chassant les marchands du temple, rapporté par les quatre Évangiles, car la maison destinée à l’origine à la glorification de Dieu était devenue maison de commerce.

Néanmoins, le Seigneur Jésus Christ, fils de son peuple, héritier de la religion de l’Ancien Testament, en obéissance à Son Père céleste et à Ses parents terrestres, la Vierge Marie, qui le mit au monde, et Joseph, son père légal sur la terre, sans être Son père dans la chair, est porté tout enfant au temple de Jérusalem pour être consacré à Dieu. Siméon voit en Lui le prêtre selon l’ordre de Melchisédech dont parlera saint Paul par la suite.

Jésus Christ n’appartenait pas à la tribu de Lévi. Il n’était pas, pour ainsi dire, un prêtre professionnel. Il n’avait pas hérité du sacerdoce. Il n’est dit nulle part qu’Il ait sacrifié au temple de Jérusalem. Mais l’Évangile le montre toujours présent au temple, lorsqu’Il était à Jérusalem. Il y priait, Il y enseignait Ses disciples, y exhortait les pharisiens. Le temple ne Lui était pas indifférent parce qu’Il était prêtre selon l’ordre de Melchisédech.

Melchisédech est un personnage mystérieux de l’Ancien Testament, un prêtre du Dieu Très-haut qui accueillit Abraham et lui apporta du pain et du vin. Nous ne savons rien de ce personnage : on ne sait ni à quelle tribu il appartenait, ni comment ce prêtre du Dieu Très-haut apparut dans l’environnement païen dans lequel se vivaient Abraham et sa famille.

Les commentateurs de l’antiquité avaient déjà discerné dans ce personnage quelque chose de particulier. L’apôtre Paul, lui, vit en lui le prototype de Jésus Christ, devenu Grand-prêtre selon l’ordre de Melchisédech, parce qu’à la différence des prêtres d’Israël, Il ne sacrifiait pas d’animaux, ni ne participaient aux sacrifices sanglants du temple de Jérusalem, qui, comme dit l’apôtre Paul, ne pouvaient pas purifier les hommes de leurs péchés. Mais Il s’offrit Lui-même en sacrifice pour les péchés, Il donna Sa vie pour le salut des hommes et, par Son Sang divin, Il nourrit les hommes afin que, purifiés de leurs péchés, ils reçoivent en eux ce Sang et s’unissent à Dieu spirituellement et corporellement.

La Sainte Rencontre est aussi la fête de la rencontre des hommes avec Dieu, des hommes qui ont vu voir en ce petit enfant impuissant le Dieu incarné. A notre époque non plus tous ne parviennent pas à voir en Jésus Christ le Dieu incarné. Certains ne croient pas du tout en Dieu, certains ne croient pas que Jésus Christ soit Dieu et Sauveur. Beaucoup se disent orthodoxes, mais ne le sont que par la naissance ou par l’origine, ayant hérité de la foi orthodoxe comme les prêtres vétérotestamentaires héritaient de leurs pères, de leurs grands-pères, de leurs aïeux, mais ils ne lisent pas l’Évangile, ne communient pas aux Saints Mystères du Christ et n’ont pas connu par expérience que le Seigneur Jésus Christ est le Sauveur du monde.

Dieu nous a conduits à l’Église, nous y avons rencontré le Seigneur Jésus Christ, comme l’accueillit le vieillard Siméon. Nous L’avons reçu non seulement dans nos bras, mais dans tout notre corps en communiant aux Saints Mystères. Notre rencontre avec Dieu se produit chaque fois que venons à l’église pour la Divine liturgie et que nous communions aux Saints Mystères. Ce n’est pas pour rien que les prières lues après la communion à l’église ou chez soi se terminent par le cantique de saint Siméon : « Maintenant, ô Maître, tu peux laisser aller en paix Ton serviteur selon Ta parole ; car mes yeux ont vu Ton salut, préparé à la face de tous les hommes… »

Pour le vieillard Siméon, cette prière signifiait qu’après la rencontre avec le Sauveur, il était prêt à mourir, car sa vie terrestre était parvenue à son but, à sa fin. Il vivait pour rencontrer le Christ, et son espérance, sa prière, avaient été comblées. Pour nous, la rencontre avec le Christ signifie que le Seigneur nous donne une chance de poursuivre notre vie chaque fois que nous communions aux Saints Mystères du Christ. Pas de la poursuivre comme les gens du siècle, mais pour qu’elle soit préparation à la rencontre avec le Christ dans l’éternité, pour que notre vie soit emplie de Sa présence divine. Pour que cette expérience que nous faisons aujourd’hui, dans l’Église, en communiant au Seigneur Jésus Christ, en Le recevant dans nos bras, comme saint Siméon, en Le recevant en notre sein, comme la Sainte Mère de Dieu, nous puissions Le transmettre à d’autres. Pour que ceux qui ne connaissent pas le Christ viennent un jour à Lui ; pour que ceux qui n’ont pas encore reconnu en Lui le Dieu et Sauveur reconnaissent en Lui non seulement le Sauveur du monde, mais aussi le Sauveur de leur âme. Amen.

Bonne fête de la Sainte Rencontre, que le Seigneur vous garde ! »