Le patriarche Cyrille : Le papisme est dangereux parce qu’il est plus facile d’influencer une seule personne qu’un groupe entier
Le 4 novembre 2019, après la célébration de la Divine liturgie à la cathédrale de la Dormition du Kremlin de Moscou, le patriarche Cyrille a adressé un discours aux personnes rassemblées pour les agapes. Sa Sainteté a évoqué les phénomènes de crise en cours dans l’Orthodoxie mondiale :
« Nous traversons aujourd’hui certaines difficultés, en premier lieu dans nos rapports avec Constantinople. Mais, à la différence de Constantinople, qui agit en violation des règles canoniques, intervenant dans le domaine d’une autre juridiction et accordant « l’autocéphalie » à ceux qui ne l’ont pas demandée, qui insiste sur des privilèges qu’il n’a jamais eu, notre Église n’aspire pas à prendre le pouvoir au niveau panorthodoxe. Nous voulons uniquement sauvegarder l’ordre canonique, et nous ne pouvons pas admettre qu’une espèce de papisme, de « quasi-papisme » s’introduise dans l’Orthodoxie.
Je vais dire quelque chose d’un peu inattendu, peut-être. Pourquoi le papisme est-il dangereux ? Certes, parce que le papisme ne trouve son origine ni dans la Parole de Dieu, ni dans la Tradition de l’Église. Mais je proposerai un autre argument, tout à fait différent : le papisme est dangereux parce qu’il est plus facile d’influencer une seule personne qu’un groupe entier. Le pape, comme le patriarche qui voudrait devenir pape, devient une cible pour les grands de ce monde, et les influences extérieures s’exerçant sur cette personne peuvent mener l’Église à sa perte.
Lorsque le système collégial de direction de l’Église s’est mis en place, les saints apôtres ont bien compris ce qu’ils faisaient. Il était impossible, dans le contexte de l’Empire romain, qu’une seule personne portât la responsabilité de l’Église entière, car elle aurait pu être arrêtée, on aurait pu l’inciter à collaborer, on aurait pu l’intimider. Cependant, ces risques disparaissent si l’Église est dirriger de façon collégiale, conciliaire.
C’est pourquoi il faut défendre aujourd’hui la direction collégiale de l’Église universelle. Nous ne mettons pas en doute la primauté d’honneur du patriarche de Constantinople, mais nous ne sommes d’accord avec aucune espèce de prétention à l’autorité universelle. Le patriarche de Constantinople, qui réside sur le territoire de la Turquie, est personnellement très vulnérable, c’est pourquoi il ne reste qu’à prier pour que le Seigneur le libère des influences qui peuvent avoir des conséquences néfastes pour l’Église entière. »