Rencontre du primat de l’Église orthodoxe russe avec le patriarche et catholicos suprême de tous les Arméniens
Le 2 avril 2019, le patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie a reçu Garéguine II, patriarche et catholicos suprême de tous les Arméniens, à sa résidence du monastère Saint-Daniel.
Prenaient part à la rencontre : le métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou, l’archimandrite Philarète (Boulekov), vice-président du DREE, l’hiéromoine Stéphane (Igoumnov), secrétaire du DREE aux relations interchrétiennes, le prêtre Alexandre Volkov, directeur du Service de presse du patriarche de Moscou et de toute la Russie, S. Alferov, collaborateur du DREE.
Le patriarche des Arméniens était accompagné de l’archevêque Ezras Nersissian, chef du diocèse de Russie et de Novo-Nakhitchevansk de l’Église apostolique arménienne, du proto-archimandrite Chagué Ananian, directeur du Département des relations interecclésiales du St-Siege d’Etchmiazine, du prêtre Vagram Melikian, directeur du Service de presse, et du moine Anania Tsaturian, secrétaire patriarcal.
Le patriarche Cyrille a souhaité la bienvenue au patriarche et catholicos Garéguine II : « Chacune de nos rencontres nous permet de parler des relations bilatérales entre nos Églises que, grâce à Dieu, rien n’est venu assombrir, et qui se développent contre le doivent des relations entre frères. Nous apprécions hautement le niveau de relations qui s’est établi entre nos Églises. »
Le patriarche Cyrille a remercié pour la participation d’une délégation de l’Église apostolique arménienne aux célébrations du 10e anniversaire du Concile local de 2009, et pour les félicitations du primat arménien à l’occasion de l’anniversaire de son intronisation patriarcale, soulignant que, depuis cet évènement, les relations entre les deux Églises avaient continué à se développer de la façon la plus positive.
Le primat de l’Église orthodoxe russe a aussi exprimé ses condoléances pour le décès récent, le 8 mars dernier, du patriarche arménien de Constantinople, Mesrob II, à l’âge de 64 ans.
Évoquant les relations bilatérales entre l’Église orthodoxe russe et l’Église apostolique arménienne, Sa Sainteté a souligné : « D’une façon générale, il faut dire que rien n’est venu assombrir nos rapports. En même temps, des questions se posent, des problèmes interviennent inévitablement, que nous devrons résoudre ensemble. »
Mentionnant les changements dans la vie politique arménienne, à la suite des dernières élections, le primat de l’Église russe a dit espérer que les relations entre l’Église et l’état en Arménie resteraient au même niveau. « L’Église apostolique arménienne joue un rôle tout à fait particulier dans la vie de son peuple, dans la culture. Elle est un facteur important, assurant le respect du monde entier au peuple arménien, notamment celui du peuple russe et de l’Église orthodoxe russe. »
Le patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie s’est arrêté longuement à la situation en Ukraine. « La position de l’Église orthodoxe ukrainienne canonique ne s’améliore pas, a-t-il constaté. Je m’étonne que dans un pays européen, qui proclame son attachement au choix européen, on puisse violer aussi grossièrement les droits de l’homme et les libertés religieuses au su et au vu de toute l’Europe. L’Église ukrainienne canonique fait aujourd’hui l’objet de discriminations, c’est un fait certain. »
Sa Sainteté a rappelé qu’en Ukraine deux groupes schismatiques avaient fusionné artificiellement en un seul, qui n’en reste pas moins une entité schismatique non reconnue comme canonique par les Églises orthodoxes locales. « Malheureusement, le patriarche de Constantinople a octroyé une sorte « d’autocéphalie » à ce groupe, ce qu’il n’avait absolument pas le droit de faire, puisque l’Ukraine fait partie de l’Église russe depuis 300 ans, et que personne ne peut réécrire l’histoire » a souligné le patriarche Cyrille. « Si l’on se met à réécrire l’histoire avec tant de facilité, si l’on change comme cela les documents juridiques et canoniques qui ont fixé un statut, c’est le chaos qui nous attend. C’est une infraction à toutes les normes canoniques. C’est pourquoi nous défendons, naturellement, les droits de l’Église orthodoxe ukrainienne, et estimons que les droits des fidèles doivent être protégés. »
Les fidèles ne devraient pas craindre qu’on viennent leur prendre leur église, a déclaré le patriarche. Cependant, a-t-il remarqué, il y a déjà eu plus de 60 bâtiments cultuels usurpés par la violence. « Il ne faudrait surtout pas qu’on s’en prenne aux sanctuaires qui sont très importants pour l’Orthodoxie russe, tant pour les Ukrainiens que pour les Russes, pour toutes les nations et pour tous les peuples qui font partie de notre Église » a souligné le patriarche. « Certes, le respect de l’ordre dans ces lieux saints et le respect des droits des fidèles de l’Église canonique ukrainienne sont une condition absolue pour qu’on puisse parler du respect des droits et des libertés des croyants en Ukraine. » Le primat de l’Église russe s’est dit inquiet des propositions faites par des politiciens nationalistes radicaux de saisir les églises et les monastères de l’Église ukrainienne, pour les remettre ensuite à des associations religieuses non canoniques.
L’intervention de Constantinople dans la situation en Ukraine n’a pas aidé à la réunification des orthodoxes en Ukraine, elle n’a résolu aucun problème, mais en a créé de nouveaux, a dit le patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie, constatant aussi que « ces problèmes concernent non seulement l’Ukraine, les fidèles ukrainiens, qui souffrent de la situation actuelle, mais, malheureusement, l’ensemble de la famille orthodoxe, dont l’unité en a été affaiblie. Nous le regrettons infiniment, mais nous n’avons pas été les initiateurs de ces pénibles circonstances. »
Durant la suite de l’entretien, le patriarche a souligné l’importance de la présence d’une communauté arménienne sur le territoire de la Fédération de Russie. « Cette communauté de l’Église apostolique arménienne a les mêmes droits que toute autre association religieuse, dont l’Église orthodoxe russe, les mêmes possibilités. Cela permet de garantir une véritable égalité des droits des fidèles de différentes confessions religieuses présentes sur le territoire de la Fédération de Russie. Nous l’apprécions beaucoup, et nous estimons que c’est la condition du développement d’une vie religieuse normale, notamment pour la communauté arménienne. »
De son côté, le patriarche et catholicos suprême de tous les Arméniens a chaleureusement félicité le patrairche Cyrille du 10e anniversaire de son élection au siège patriarcal moscovite. « Nous sommes heureux d’être une nouvelle fois à Moscou et de vous rencontrer, afin de vous exprimer nos vœux fraternels de longue vie, de bonne santé et d’un patriarcat long et fructueux. Nous prions ensemble pour que le Dieu Tout-puissant nous bénisse et nous garde, nous prions aussi pour le clergé de l’Église orthodoxe russe et pour le peuple russe très pieux, notre frère. »
Garéguine II a ensuite dit au primat de l’Église orthodoxe russe : « Durant les années de votre patriarcat, grâce à Dieu, la mission a obtenu des résultats considérables, de nombreuses églises ont été construites, vous avez obtenu de grands résultats dans les domaines éducatif, social et autres. Dans la mission de Votre Sainteté, la première place est occupée par la consolidation de la coopération entre les nations, entre les Églises et entre les religions. »
« Il est heureux de voir que les relations établies entre les autorités de la Fédération de Russie et l’Église orthodoxe russe portent de bons fruits, contribuent au progrès et à la prospérité de la vie ecclésiale et sociale du peuple russe » a constaté le chef de l’Église apostolique arménienne.
Le patriarche et catholicos a mentionné avec satisfaction l’existence de liens fraternels séculaires entre les deux peuples, remarquant qu’ils étaient renforcés par la collaboration entre les états et par l’évolution positive des relations entre le Patriarcat de Moscou et l’Église apostolique arménienne.
Constatant que le patriarche Cyrille se prononçait invariablement pour la préservation des valeurs spirituelles et morales, pour leur application à la vie de l’état et de la société, le patriarche et catholicos de tous les Arméniens a dit : « En ce sens, nous sommes heureux, notamment, de constater une consolidation encore plus grande de la coopération entre les Églises orientales antiques et les Églises orthodoxes locales, l’union des efforts sur les questions sociales les plus variées, tenant compte d’exemples particulièrement réussis et consolant de coopération entre nos Églises dans le contexte difficile du Proche-Orient. »
Le chef de l’Église apostolique arménienne a aussi constaté le rôle important de Sa Sainteté le patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie dans l’organisation de rencontres trilatérales entre leaders religieux, pour contribuer à la résolution pacifique du conflit dans le Haut-Karabakh. « La régulation exclusivement pacifique du conflit du Karabakh est essentiel pour la préservation de la paix et de la stabilité dans la région, a-t-il souligné. Pour la résolution du problème, l’établissement d’une atmosphère contribuant à la paix a une importantce primordiale, notamment par la tenue de manifestations augmentant la confiance mutuelle et diminuant la rhétorique guerrière. »
L’entretien a ensuite porté sur différentes questions relatives à l’activité de l’Église orthodoxe russe en Arménie.
Des cadeaux ont été échangés à la fin de la rencontre.