L’ouverture solennelle du VIe Congrès mondial des compatriotes russes résidant à l’étranger a débuté le 31 octobre 2018, au Centre du commerce international de Moscou. Le thème de l’assemblée plénière était cette année : « La Russie et les expatriés : nouveaux défis, nouvelles frontières ».

Le ministre des Affaires étrangères de la Fédération russe, S. Lavrov, a ouvert le congrès, soulignant notamment que des rencontres de cette envergure permettaient de mieux comprendre les attentes des communautés russes des autres pays, de s’accorder avec elles sur les mesures à prendre ensemble pour coordonner les efforts, pour réaliser différentes entreprises utiles dans des domaines diverses, afin de défendre les droits légitimes et les intérêts des compatriotes de l’étranger.

« A l’heure actuelle, il existe des associations d’expatriés russes dans plus de cent pays du monde, a souligné S. Lavrov. On ne saurait surestimer leur contribution dans la création de conditions favorables à l’étude de la langue russe, à la popularisation des réalisations de la culture nationale. Des paroisses de l’Églises orthodoxe russe et d’autres confessions traditionnelles ouvrent. Je me réjouis que le processus de cohésion et de d’auto-organisation se poursuive. De notre côté, nous sommes prêts à encourager et à augmenter les efforts dans cette direction. »

Le président du Comité aux affaires internationales du Conseil de la Fédération de l’Assemblée fédérale de la Fédération de Russie, K. I. Kossatchev, a lu le message du président du Conseil de la Fédération, V. Matvienko. « Le Conseil de la Fédération de l’Assemblée fédérale de la Fédération de Russie accorde une grande importance au soutien des compatriotes résidant à l’étranger, et est prêt à contribuer pleinement au développement de la base juridique nécessaire, dit le message. Aujourd’hui, dans un contexte international difficile, la nécessité de s’entraider, d’établir des relations stables avec la diaspora russe, de consolider sa position dans les pays de résidence, ainsi que d’unir les efforts, se fait plus que jamais sentir. »

Ensuite, le métropolite Hilarion de Volokolamsk a prononcé une allocution.

Saluant l’assemblée au nom du patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie, le métropolite a remarqué : « Que nous vivions au pays ou à l’étranger, nous sommes unis par une histoire commune, qui comporte aussi bien des pages glorieuses et victorieuses, que des pages difficiles et tragiques. »

Monseigneur a rappelé que la rencontre actuelle a lieu l’année du centenaire de l’horrible assassinat de la famille impériale, un triste jubilé qui oblige à se tourner vers les évènements tragiques du siècle dernier, inséparables du destin de la diaspora russe. « Avec l’arrivée au pouvoir des bolcheviks, après le coup d’état d’octobre 1917, une guerre fratricide sanglante s’est déchaînée, et l’échec de l’armée blanche a provoqué une émigration massive. La Russie a perdu quantité de citoyens de tous milieux sociaux. D’après des estimations aproximatives, entre 1 et 3 millions de personnes ont quitté le pays. »

Le métropolite Hilarion a rappelé que cet exode massif était à l’origine d’un phénomène unique à l’étranger, celui de la « diaspora russe ». « Sur quelque continent et dans quelque pays qu’ils se trouvassent, notre Église était aux côtés des émigrés russes, partageant leurs afflictions et leurs privations. Les paroisses de l’étranger étaient des centres d’attraction naturels pour les communautés russes, où les expatriés orthodoxes trouvaient consolation et pouvaient refaire leurs forces spirituelles. L’Église était pour nos frères et sœurs un appui sûr, elle les a aidés à conserver leur identité culturelle et historique. Dans les conditions de « l’exode russe », l’Église a été un principe de cohésion pour les compatriotes à l’étranger », a témoigné l’archipasteur, précisant que les nouvelles vagues d’émigration ont fait la même expérience durant les décennies suivantes.

Le métropolite Hilarion a attiré l’attention sur le fait que l’unité canonique de l’Église orthodoxe russe était actuellement menacée : le Patriarcat de Constantinople a déclaré unilatéralement l’Ukraine son territoire canonique, reconnaissant et recevant dans sa communion la « hiérarchie » des communautés ukrainiennes schismatiques, déclarant ensuite son intention de créer une « église locale » en Ukraine et de lui accorder le statut d’autocéphalie.

« Afin de justifier son ingérence anticanonique en Ukraine, le Patriarcat de Constantinople a déclaré nul des documents historiques de trois cents ans d’ancienneté, leur trouvant une interprétation qui ne repose sur rien. Il a ainsi rompu les accords bilatéraux entre nos Églises et les obligations prises, notamment par écrit, par le patriarche Bartholomée envers notre Église » a raconté le président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou. Les principes de charité fraternelle entre Églises orthodoxes locales ont été foulés aux pieds, a-t-il souligné, et la confiance élémentaire, au niveau humain, sans laquelle même les relations diplomatiques sont impossibles, a été trahie.

« Le but des actes iniques du Patriarcat de Constantinople est de détruire l’unité de l’Église russe, ils agissent sur commande politique, a affirmé le métropolite Hilarion. En quelques jours, le Département d’état des États-Unis d’Amérique a publié deux déclarations de soutien au projet de prétendue « autocéphalie ukrainienne », initié par le patriarche Bartholomée. Les autorités ukrainiennes disent franchement que la nouvelle structure sert des intérêts strictement politiques : avant tout isoler les orthodoxes d’Ukraine de la Russie et de l’Église russe. » L’archipasteur a souligné qu’on tentait de prendre l’Église orthodoxe russe en otage dans le contexte de confrontation politique globale entre la Russie et l’Occident.

Comme l’a remarqué Mgr Hilarion, conformément aux normes fondamentales du droits canon, l’Église orthodoxe russe a été obligée de rompre la communion eucharistique et la communion de prière avec le Patriarcat de Constantinople après la réception des chefs et des hiérarques du schisme dans leurs rangs. Cela a rendu impossible la participation du Patriarcat de Moscou aux manifestations et aux offices célébrés en commun avec l’épiscopat et les clercs du Patriarcat de Constantinople. « Nous attendons de nos compatriotes de l’étranger qu’ils se montrent compréhensifs dans cette situation difficile, qu’ils fassent preuve de cohésion et qu’ils soutiennent encore plus nos commauntés de l’étranger et les paroisses de notre Église… » a dit l’hiérarque.

Il a rappelé que se montrer intransigeant sur les canons ne signifie pas renoncer à entretenir de bons rapports humains avec les orthodoxes du monde entier : « Les ennemis de l’Orthodoxie dans le monde entier sèment la discorde entre nous, s’efforcent d’isoler notre Église, mais nous devons surmonter ces obstacles par la patience et par la charité. »

« Par les prières des nouveaux martyrs et des confesseurs de l’Église russe, du cortège des saints ayant illuminé la terre russe, notre peuple a su surmonter les épreuves tragiques du siècle dernier, a remarqué le métropolite Hilarion. Je suis convaincu que la force de la foi nous aidera aujourd’hui encore, et que le lien vivant avec le passé permettra de regarder l’avenir avec espérance. »

Une discussion en assemblée plénière sur « Le patrimoine russe et l’identité comme base de la consolidation » a suivi cette allocution. Dans la suite du congrès, le président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine est intervenu lors de la discussion sur « La diaspora russe : réalités contemporaines dans le monde et formation d’une nouvelle génération ». « Le présent forum a rassemblé plus de sept cents citoyens venant de différents pays. Ensemble, vous représentez l’immense communauté des expatriés russes, vous représentez l’immense Monde russe qui ne s’est jamais construit uniquement sur une base ethnique, nationale ou religieuse. Il rassemble et réunit ceux qui sont spirituellement liés à la Russie, qui sentent un lien spirituel avec notre patrie, qui se considèrent comme dépositaires de la langue, de la culture et de l’histoire russe. Je tiens à vous remercier sincèrement de votre contribution à la vie du pays, de votre soutien inébranlable, de votre solidarité. Nous vous sommes reconnaissants de votre contribution à la promotion et à la diffusion de notre riche patrimoine historique et culturel, de tout ce qui forme notre identité nationale. »

Le chef de l’état a souligné : « Je ne peux pas ne pas parler des efforts de l’Église orthodoxe russe, d’autres confessions traditionnelles comme l’islam, le judaïsme, le bouddhisme (je vois beaucoup de représentants de ces confessions dans la salle, et je tiens à les saluer). Je les remercie d’affermir les liens culturels et humanitaires de nos expatriés avec la Russie. Malheureusement, on cherche aujourd’hui, par différents moyens, à vous déchirer, à rompre ces liens, à parquer les gens dans des « quartiers nationaux ». Je tiens à souligner une chose : les manœuvres politiciennes, dans une sphère aussi sensibles, ont toujours eu de graves conséquences, avant tout pour leurs auteurs. Notre devoir commun, devant les gens, est de faire notre possible pour préserver l’unité spirituelle et historique. »

Dans le cadre de cette discussion, se sont exprimés : le métropolite Corneille des Vieux-croyants, l’adjoint au président du Conseil des muftis de Russie, le directeur de l’Agence fédérale aux affaires de la CEI, des compatriotes de l’étranger et de la coopération humanitaire internationale (Rossotroudnitchestvo), etc.

Les participants ont poursuivi leurs travaux en cinq sections thématiques : « La défense des droits et des intérêts légitimes des expatriés », « La sauvegarde de l’identité russe : le soutien à l’enseignement russophone », « Le rôle de la jeunesse dans la cohésion de la communauté », « Les médias de la diaspora russe dans le monde contemporain », « La coopération économique de la Russie avec les pays étrangers et avec les compatriotes de l’étranger ».

Le congrès se poursuivra durant la journée du 1er novembre.