Le patriarche Cyrille a rencontré le chef de l’Église éthiopienne
Le 17 mai 2018, fête de l’Ascension, le patriarche Cyrille a rencontré le chef de l’Église éthiopienne, Sa Sainteté le patriarche-catholicos Abuna Mathias.
Prenaient part à la rencontre les membres de la délégation officielle de l’Église éthiopienne : Abuna Enthons, archevêque du diocèse d’Harerge occidental, Abuna Philippe, évêque du diocèse d’Omo du Sud, Abuna Aregawi, évêque du diocèse de Gonder du Sud, l’hiéromoine Kidane Mariam, assistant personnel de Sa Sainteté, le prêtre Kiross Weldeab, chef du Service des médias, Musie Hailu, chef du Service du protocole.
L’Église orthodoxe russe était représentée à la rencontre par le métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou ; l’archimandrite Philarète (Boulekov), vice-président du DREE ; l’hiéromoine Stéphane (Igoumnov), secrétaire du DREE aux relations interchrétiennes ; l’hiéromoine Jean (Kopeïkine), vice-recteur de l’Institut des Hautes Études Saints-Cyrille-et-Méthode ; V. Kipchidze, vice-président du Département synodal aux relations de l’Église avec la société et les médias.
Souhaitant chaleureusement la bienvenue à son hôte et à la délégation qui l’accompagne, le patriarche Cyrille a souligné : « C’est la première fois que vous vous trouvez sur le territoire de notre Église, de notre pays. Vous pourrez voir quelle est la vie religieuse de notre peuple. La dernière fois qu’un chef de l’Église éthiopienne est venu nous voir, c’était il y a 22 ans, en 1996, lors de la visite d’Abuna Paul, votre bienheureux prédécesseur. Je me souviens aussi de la visite de Sa Sainteté le patriarche Takla Haymanot, en 1978, ainsi que de la visite de Sa Sainteté le patriarche Pimène de Moscou et de toute la Russie en Éthiopie, en 1974. »
Sa Sainteté a déclaré garder un bon souvenir de son premier voyage dans ce pays lointain d’Afrique, en 1971. « La réunion du Comité central du Conseil œcuménique des églises avait lieu cette année-là à Addis-Abeba. Je participais à cette réunion et j’avais, bien sûr, pu visiter les églises de la ville » a raconté le patriarche Cyrille.
« Les rapports entre nos peuples ont de profondes racines historiques » a témoigné le primat de l’Église orthodoxe russe, constatant notamment que la visite du patriarche-catholicos Abuna Mathias avait lieu l’année du 120e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques officielles entre les états russe et éthiopien. « Cet évènement a joué un grand rôle dans l’instauration de bonnes relations d’amitié entre la Russie et l’Éthiopie, entre nos Églises, a poursuivi Sa Sainteté. Nous avons toujours montré un intérêt particulier pour la vie de l’Église d’Éthiopie, avons reçu de bon cœur vos étudiants et vos délégations dans les années 1970. Ensuite, nous avons été touchés des difficultés qu’ont vécues votre Église et votre peuple. Aujourd’hui, nous nous réjouissons avec vous de la prospérité de l’Église éthiopienne et de vos succès. »
Dans la suite de la conversation, le patriarche de Moscou et de toute la Russie est revenu sur la situation en Afrique du Nord et au Proche-Orient, sur la situation des communautés chrétiennes qui y vivent. « Il va de soi que ce sont les chrétiens qui souffrent le plus dans cette région, a constaté Sa Sainteté. Les agents des terroristes s’y montrent particulièrement actifs, et les chrétiens sont souvent victimes de leurs agissements. »
« Nous savons que certains de vos fidèles ont aussi été victimes de la terreur, a poursuivi le patriarche Cyrille, s’adressant au patriarche-catholicos Abuna Mathias. Le monde entier a été bouleversé par les images de la cruelle exécution de chrétiens de l’Église éthiopienne, en avril 2015, sur les bords de la mer Méditerranée, en Lybie. Plusieurs mois auparavant, comme vous le savez, des fidèles de l’Église copte avaient péri de la même façon. »
Le christianisme est la communauté religieuse la plus persécutée du monde, a témoigné le primat de l’Église orthodoxe russe.
« Il semblerait que les pays de tradition chrétienne devraient s’unir pour faire barrière à un phénomène aussi atroce que le terrorisme, notamment dirigé contre les chrétiens. Au lieu de quoi, les divergences entre les grandes puissances ne font que s’approfondir, et les pays qui possèdent un background historique chrétien, malheureusement, ne sont pas en bons rapports aujourd’hui » a constaté le patriarche Cyrille.
Évoquant, à ce propos, la situation en Syrie, Sa Sainteté a dit notamment : « Les États-Unis et la Russie n’ont jamais été aussi proches de l’affrontement que sur ce territoire, où tous deux ont pris part aux opérations militaires. J’ai senti que nous étions à un moment particulièrement dangereux de l’histoire, car une confrontation, même accidentelle, des deux puissances, aurait pu provoquer une guerre nucléaire destructive pour la civilisation humaine. Alors j’ai résolu d’entrer en contact avec le pape François de Rome. Nous avons décidé de nous rencontrer. J’estime que la déclaration que nous avons signée ensemble a eu beaucoup d’importance. »
Le patriarche Cyrille a exprimé sa conviction que les communautés religieuses possédaient un grand potentiel de paix et que ce potentiel devait être mis en action. « Nous sommes intéressés à l’établissement d’une paix solide sur le continent africain, à la cessation de la lutte contre la présence chrétienne dans la région » a souligné Sa Sainteté, assurant que les Églises et les communautés chrétiennes devaient unir leurs efforts pour élaborer une approche commune de la question du terrorisme et, notamment, d’un phénomène comme le génocide de la population chrétienne dans plusieurs pays.
Au cours de l’entretien, Sa Sainteté a évoqué le dialogue théologique entre l’Église orthodoxe et les Églises orientales, dialogue qui s’était développé avec un certain succès dans la seconde moitié du XX siècle : « Ces dernières années, il y a eu des tentatives pour organiser des consultations afin de réanimer ce dialogue. Les réunions de dialogue entre l’orthodoxie et le courant préchalcédonien suivent un ordre strict lequel, notamment, les réunions sont proposées, de la part des orthodoxes de notre tradition, par le Patriarcat de Constantinople, et, de la part de votre tradition, par le Patriarcat copte. Pour l’instant, il n’y a eu aucune initiative de prise, mais nous espérons que cela viendra. »
Sa Sainteté a souligné que cette interruption dans le dialogue n’était pas un obstacle au développement des contacts dans des domaines pratiques entre le Patriarcat de Moscou et l’’Eglise éthiopienne. Dans le cadre du dialogue bilatéral, on pourrait discuter des problèmes de l’actualité des rapports entre l’’Eglise et la société, de l’action sociale et du la diaconie ; il serait possible de procéder à un échange d’expérience dans le domaine missionnaire. « Il serait également utile de réactiver les contacts entre établissements d’enseignement de la théologie » a poursuivi Sa Sainteté. « Nous sommes prêts à inviter vos étudiants pour être formés en Russie. »
De son côté, le patriarche-catholicos Abuna Mathias a remercié Sa Sainteté le patriarche Cyrille de son invitation en Russie et de la chaleureuse hospitalité faite à la délégation de l’Eglise éthiopienne. « Mon objectif est de réactiver les relations entre nos Églises. Nous avions d’excellentes relations, et nous voulons les reprendre » a constaté le chef de l’Église éthiopienne.
Le patriarche-catholicos Abuna Mathias s’est dit intéressé par le développement de la coopération dans le domaine de la formation des étudiants. « Beaucoup d’Éthiopiens ont étudié dans vos établissements. Certains d’entre eux sont devenus plus tard évêques, archevêques et poursuivent leur ministère en Éthiopie » a-t-il constaté.
Le chef de la délégation éthiopienne a parlé au patriarche Cyrille de la difficile situation des Églises africaines aujourd’hui. « Les extrémistes attaquent les églises, détruisent le patrimoine. Les terroristes tuent les gens, organisent des assassinats. Ils tuent non seulement les chrétiens, mais aussi les musulmans qui ne sont pas d’accord avec leur idéologie, a-t-il témoigné.
Constatant la difficulté et le danger du problème du terrorisme, le patriarche éthiopien a assuré : « Le monde a besoin de le résoudre, et les chrétiens doivent faire preuve de solidarité sur cette question. Les extrémistes viennent on ne sait d’où, ils ne sont pas liés à un pays en particulier. Ils commettent des excès, par exemple en Syrie, où ils détruisent des églises, tuent les gens, commettent des crimes atroces. La guerre se poursuit depuis des années. Les gens meurent, un patrimoine de plusieurs milliers d’années a été détruit. »
Des cadeaux ont été échangés à la fin de la rencontre.
Un communiqué a été publié, proposant aux Synodes de l’Eglise orthodoxe russe et de l’Église éthiopienne de créer une Commission de dialogue bilatéral.
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