Le 4 décembre 2014, fête de l’Entrée au Temple de la Mère de Dieu et 97e anniversaire de l’intronisation de saint Tikhon, Patriarche de Moscou, Sa Sainteté le Patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie a concélébré la Divine liturgie avec Sa Béatitude le métropolite Tikhon d’Amérique et d’Alaska en la cathédrale de la Dormition au Kremlin de Moscou.

De nombreux hiérarques et clercs concélébraient.

Suivant la tradition, l’office de l’Entrée au Temple de la Mère de Dieu a été suivi par des représentants de l’Académie militaire des troupes de missiles stratégiques Pierre-le-Grand, qui fêtent ce jour l’anniversaire de la fondation de leur établissement. Parmi eux, le général A. Sivatchev, des enseignants et des étudiants de l’Académie.

Après la litanie instante, le Primat de l’Église orthodoxe russe a dit une prière pour la paix en Ukraine.

Après la liturgie, le Patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie a prononcé une homélie.

« L’évènement dont nous faisons mémoire aujourd’hui marque le début du cheminement spirituel de la Mère de Dieu. C’est aussi le début de son chemin de croix. Pour avancer sur ce chemin depuis l’enfance jusqu’à la Dormition, il lui a fallu s’appuyer à la fois sur ses propres forces et sur la grâce divine. Dans la mesure où la grâce divine est toujours donnée en réponse aux efforts de la personne, il a fallu que la Mère de Dieu se préparât à la réception de cette grâce. Cette préparation a commencé avec son entrée au temple de Jérusalem.

Gravissant les marches de ce temple, elle a marché à la rencontre de Dieu, elle a marché à la rencontré de l’Annonciation, elle a marché à la rencontre de la Nativité du Divin Enfant, à la rencontre de la difficile destinée qui fut la sienne, à la rencontre de son Golgotha et de sa solennelle Dormition. De la même façon, dans la vie des gens, la grâce, sans laquelle personne ne peut réussir, ni être heureux, ni vivre en plénitude, nous est donnée en réponse à nos efforts. A l’exemple de la Mère de Dieu, nous devons aller à la rencontre de la grâce divine en passant par le temple de Dieu. C’est pourquoi nous bâtissons aujourd’hui tant d’églises sur le sol de notre patrie, car nous comprenons que si les gens n’entrent pas au temple, ils ne rencontreront pas réellement Dieu, car l’homme accueille l’action de la grâce divine par le cœur et par l’esprit.

Nous faisons aujourd’hui beaucoup d’efforts pour construire des centaines d’églises rien que dans la capitale, à Moscou. C’est une tâche compliquée, mais si elle était facile, elle ne serait pas si importante et si sainte, car c’est en surmontant les difficultés que nous grandirons en même temps que ces églises et irons à la rencontre du Seigneur.

Je remercie particulièrement nos volontaires, notamment parmi les jeunes, qui aident à construire ces églises, qui participent à de nombreuses manifestations publiques, en particulier lorsque les gens doutent de la nécessité d’une église, lorsqu’influencés par différents facteurs externes, ils se disent qu’ils n’ont pas besoin d’une église, mais plutôt d’un parking ou d’un énième centre commercial. Lorsque ce genre de difficultés survient, il est important que les orthodoxes, et notamment les jeunes, nos volontaires, sachent aider les gens à trouver la bonne réponse.

Je crois que malgré les difficultés existantes, le Seigneur nous aidera à construire de nouvelles églises, à créer de nouvelles communautés liturgiques, eucharistiques, des paroisses dans notre capitale et dans toute l’Église orthodoxe (…) »

Le Patriarche a ensuite évoqué la visite du Primat de l’Église russe en Amérique : « Nous avons aujourd’hui une grande joie, le Primat de l’Église orthodoxe américaine, Sa Béatitude le métropolite Tikhon est ici officiellement en visite irénique. L’Église américaine est le fruit des efforts missionnaires de l’Église orthodoxe russe, et, avant tout, des moines de Valaam qui sont arrivés aux îles Aléoutes, près de l’Alaska, il y a près de 220 ans. Nous faisons mémoire de saint Germain de l’Alaska, moine de Valaam, de saint Innocent de Moscou, qui, né en Sibérie, a consacré presque toute sa vie à l’évangélisation des peuples de Sibérie orientale, du Grand Nord et de l’Alaska. Nous faisons particulièrement mémoire de saint Tikhon, Patriarche de Moscou qui a longtemps œuvrés sur le continent américain, où il beaucoup fait pour le développement du diocèse de notre Église en Amérique (…)

Saint Tikhon a été élu au siège patriarcal en 1917, le 4 décembre (…) Il est symbolique et remarquable qu’un métropolite américain portant le nom de Tikhon en l’honneur du Patriarche Tikhon célèbre aujourd’hui avec nous le jour de l’intronisation de ce saint Patriarche dans la même cathédrale de la Dormition du Kremlin de Moscou où il fut élu.

Du fond du cœur, je souhaite que Dieu aide Votre Béatitude dans tous ses travaux. Dans votre ministère sur le continent américain, vous êtes le successeur de saint Tikhon, de même que j’en suis l’indigne successeur sur le siège de Moscou. Ceci unit particulièrement nos deux sièges, nos Églises, nos peuples. L’orthodoxie est un facteur important, y compris dans la préservation de bonnes relations entre la Russie et les États-Unis d’Amérique. Tous les autres sont passagers et dépendent de l’histoire (…) La véritable amitié entre les gens et les bonnes relations ne peuvent s’établir qu’au niveau des cœurs humains.

L’Église orthodoxe en Amérique et l’Église orthodoxe russe sont le pont qui peut unir les peuples russe et américain au niveau des cœurs. Et bien que l’Église orthodoxe américaine ne soit pas très importante d’un point de vue quantitatif aux États-Unis, elle remplit une mission spirituelle particulière, car elle est l’Église-fille de l’Église orthodoxe russe, par laquelle notre peuple est lié par des liens véritablement fraternels avec le peuple américain.

Nous devons garder comme un bien précieux ce qui nous vient de l’histoire, du passé, plus particulièrement aujourd’hui, lorsque les relations entre nos pays se sont radicalement dégradées. La tâche de nos Églises est de prier et de travailler pour que le Seigneur étende sa miséricorde à nos pays, pour que par la force de Dieu la base morale s’appuyant sur la morale divine, biblique, se renforce de nouveau, pour que sur ces fondations de valeurs morales traditionnelles les relations entre nos pays s’améliorent.

C’est pourquoi le reniement de ces normes morales divines que nous observons aux États-Unis et dans beaucoup d’autres pays, nous afflige tant. C’est un immense défi pour les Églises chrétiennes. Et beaucoup d’Églises chrétiennes, en particulier les organisations protestantes, ne parviennent pas à relever ce défi, elles préfèrent renier leur identité, renoncer aux valeurs morales de l’Évangile. Mais les Églises orthodoxes ne peuvent pas agir ainsi, c’est pourquoi elles sont appelés aujourd’hui au témoignage de la foi. Nous avons le droit de le dire, dans cette cathédrale, parce que notre Église a traversé des décennies de souffrances et de martyre, mais elle n’a pas été ébranlée et est restée fidèle à elle-même. C’est pourquoi nous souhaitons de tout cœur que l’Église orthodoxe en Amérique reste fidèle au Christ, à ses commandements et soi, si ce n’est une lumière intense et forte, mais tout du moins une lumière pour son peuple. Et nous savons que dans un espace sombre, même la lueur d’une petite bougie devient un puissant repère et aide les gens à trouver le chemin du salut. »

Sa Béatitude le métropolite Tikhon d’Amérique et d’Alaska a pris la parole à son tour pour remercier le Patriarche Cyrille d’avoir pu témoigner par une célébration commune de l’unité eucharistique de l’Église orthodoxe russe et de l’Église orthodoxe en Amérique. Il a retracé l’historique de son Église, depuis les moines de Valaam évangélisateurs jusqu’à 1970, date où l’Église orthodoxe russe accorda l’autocéphalie à l’Église orthodoxe en Amérique. Après avoir évoqué les difficultés traversées par son Église au XX siècle, le métropolite Tikhon a parlé de sa présente vitalité : « L’Église orthodoxe en Amérique voit les fruits de la mission dans l’augmentation du nombre de paroisses, de missions, de monastères, d’écoles de théologie, de programmes d’enseignement religieux pour les enfants et les jeunes et la publication de nombreux ouvrages de théologie orthodoxe, scientifiques ou populaires (…) »

Sa Béatitude a terminé en remerciant Dieu de la Liturgie célébrée en commun, avant d’offrir à Sa Sainteté le Patriarche Cyrille une icône de la Mère de Dieu.