La délégation du Patriarcat de Moscou participe à l’audience des représentants des Églises orthodoxes locales chez l’archevêque de Canterbury
Le 22 mars 2013, l’archevêque de Canterbury Justin Welby a reçu les représentants des Églises orthodoxes locales venues participer aux cérémonies de son intronisation. Le métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou, l’archevêque Elisée de Souroge, l’archiprêtre Dimitri Sizonenko, secrétaire du DREE aux relations interchrétiennes et A. Erchov, assistant du président du DREE représentaient l’Église orthodoxe russe à cette audience.
Saluant l’archevêque Justin Welby, le métropolite Hilarion lui a remis un message de félicitations du Patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie, ainsi qu’un présent.
Pendant la discussion générale, le métropolite Jean de Pergame (Patriarcat de Constantinople) s’adressait à l’archevêque de Canterbury au nom des représentants des Églises orthodoxes locales. Il a souligné l’importance du dialogue théologique pour l’amélioration de la compréhension mutuelle.
A son tour le métropolite Hilarion s’est adressé à l’archevêque Justin Welby :
« Votre Grâce !
Nous espérons que le dialogue théologique continuera à se développer et nous vous souhaitons nos meilleurs vœux dans votre ministère en tant que 105e archevêque de Canterbury. Nous sommes très contents d’avoir pu participer aux cérémonies de votre intronisation. Nous savons que l’Église d’Angleterre traverse aujourd’hui une période difficile, différentes opinions, différentes positions et différents partis y coexistent. Nous espérons cependant vivement que la conception traditionnelle prévaudra dans les questions de morale chrétienne et d’organisation ecclésiale. Nous aimerions que la discussion se prolonge en se développant autour de l’antique tradition chrétienne.
Lorsque j’ai participé en tant qu’observateur à la dernière conférence de Lambeth, j’en ai parlé à plusieurs évêques. Beaucoup d’entre eux étaient inquiets de l’orientation prise dans le développement du débat interne à l’église et, avant tout, de la possibilité de l’introduction d’un épiscopat féminin.
Certains de mes interlocuteurs m’ont demandé pourquoi l’Église orthodoxe s’exprimait avec tant de fermeté contre l’épiscopat féminin, alors que la polémique sur le sacerdoce des femmes commençait à s’apaiser. Si l’épiscopat féminin est introduit, même la possibilité théorique d’une reconnaissance de la hiérarchie ecclésiastique de l’Église anglicane par notre Église sera définitivement exclue. Je voulais que vous le sachiez et que vous teniez compte de notre opinion, lorsque cette question sera de nouveau soulevée.
Nous espérons aussi que vous défendrez fermement la conception biblique traditionnelle du mariage comme union d’un homme et d’une femme, afin que ce siècle ne puisse imposer à l’Église d’Angleterre la reconnaissance de certaines formes de cohabitation que les églises chrétiennes n’ont jamais considéré comme vie conjugale.
Nous comprenons que l’Église anglicane traverse actuellement une période difficile, c’est pourquoi nous souhaitons que Dieu vous aide dans votre ministère. »
L’archevêque Justin Welby a répondu :
« Je vous suis infiniment reconnaissant de vos remarques. Je pense qu’à certains moments de l’histoire l’Église a subi des défaites à cause de ses divisions. Ces divisions surviennent parfois pour des raisons sérieuses et parfois à cause de l’égoïsme et de la peccabilité humaine.
Dans notre pays et dans d’autres pays européens, comme vous le savez parfaitement, nous sommes confrontés au problème du sécularisme. Dans ces conditions, les chrétiens doivent affirmer une conception de la personnalité humaine qui comporte obligatoirement une dimension spirituelle. On ne saurait envisager l’homme indépendamment de Dieu. En dehors de Dieu, la personne et la société sont privées de sens, d’intégrité et d’unité. En France, en Grande-Bretagne et dans de nombreux pays d’Europe, une autre philosophie a prévalu : la religion est l’affaire personnelle de chacun, les relations entre les gens doivent être régulées par l’état.
La position de l’Église d’Angleterre sur la question du mariage est parfaitement claire. Elle est inscrite dans nos canons et nous avons récemment réaffirmé que le mariage est l’union à vie d’un homme et d’une femme. Dans le même temps, dans notre société, nous reconnaissons en tant que chrétiens la valeur absolue de la personne humaine créée par Dieu. Nous ne pouvons pas reconnaître d’autres unions que le mariage mais, à l’image du Sauveur dans sa grâce et sa miséricorde, nous accomplissons notre mission au milieu des hommes, avec leurs faiblesses. Dans notre ministère pastoral, nous essayons de manifester l’amour du Christ aux gens tels qu’ils sont. Cependant, ma conviction personnelle est inchangée : le mariage est bien l’union à vie d’un homme et d’une femme.
La législation britannique sera modifiée l’an prochain. Nous essayons de résister, mais cela est impossible, de même qu’il est impossible de retenir la mer. L’Église s’élève contre les déviances qui humilient la dignité de la personne humaine. J’ai pleinement conscience de ce qu’elles sont dangereuses, et j’estime que la discussion doit se poursuivre.
A mon avis, nous devons également collaborer dans le ministère du pauvre. Dans certains pays européens, la pauvreté et la faim reviennent après de longues années de prospérité. Cela se produit parce que l’état et la société sont coupés de Dieu. Il me semble qu’en même temps que discuter sur les questions d’organisation ecclésiale nous devons manifester au monde l’amour du Christ, soutenant nos frères orthodoxes qui souffrent aujourd’hui des conséquences de la crise économique à Chypre, en Grèce et en Serbie. »
A l’issue de la rencontre, l’archevêque Justin Welby a remercié ses hôtes pour leur participation aux cérémonies et leur a remis un cadeau en souvenir.