Le 30 mars 2011, le patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie a reçu Antonio Landi, ambassadeur plénipotentiaire de la République d’Italie en Russie.

Le prêtre Serge Zvonarev, secrétaire du Département des relations extérieures du Patriarcat de Moscou aux affaires étrangères, le prêtre Dimitri Sizonenko, secrétaire temporaire aux relations inter-chrétiennes et le hiéromoine Antoine Serviuk, clerc de la paroisse Saint-Nicolas de Rome assistaient à la rencontre.

Antonio Landi a remercié le patriarche Cyrille de son accueil chaleureux et de la possibilité de s’entretenir avec le Primat de l’Église orthodoxe russe. « Je vous rends visite en tant que représentant du gouvernement italien, mais également en tant qu’individu éprouvant un profond intérêt pour l’Église orthodoxe russe », a remarqué l’ambassadeur d’Italie. Il avait été représentant diplomatique de la République italienne au Vatican a-t-il raconté. Par la suite, il avait représenté l’Italie à Belgrade, où il avait rencontré le patriarche Pavle, décédé en 2009, ainsi que de nombreux représentants de l’Église orthodoxe serbe.

Antonio Landi s’est dit reconnaissant au Primat de l’Église orthodoxe russe pour sa solidarité dans la défense des traditions chrétiennes au cours de l’examen de l’affaire « Lautsi contre l’Italie » à la Cour européenne des droits de l’homme. « En tant que représentant de la République italienne, j’aimerais vous remercier pour le soutien apporté au gouvernement italien durant l’affaire Lautsi. Finalement, cette bataille que nous avons conduit ensemble, a eu un heureux dénouement, a estimé l’ambassadeur italien. Elle nous a permis de prendre conscience de ce que nous avons en commun et qui peut avoir une suite dans l’avenir, dans la mesure où il est évident que l’avenir de l’Europe est indissociable de son passé ».

Le représentant de la République italienne à Moscou a parlé au patriache Cyrille du récent livre du professeur Carlo Cardia, L’Identité religieuse et culturelle de l’Europe. La question du crucifix, dédié à ce thème. La préface de l’édition italienne a été rédigée par Franco Frattini, ministre des affaires étrangères de l’Italie.

L’ambassadeur a relaté avoir discuté de la question de la traduction et de l’édition en langue russe de l’ouvrage du professeur Carlo Cardia, qui aborde des thèmes d’actualité pour la Russie, lors de sa rencontre avec le métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du Département des affaires extérieures. La traduction est déjà en cours. L’ambassadeur d’Italie a dit espérer que la préface à l’édition russe serait rédigée par le patriache Cyrille ou, avec sa bénédiction, par un autre représentant de l’Église orthodoxe.

S’adressant à Sa Sainteté, le chef de la représentation diplomatique d’Italie en Russie lui a transmis les salutations du Président italien et du Chef du Conseil des ministres. Il a dit espérer contribuer selon ses forces au dialogue des cultures, y compris dans le domaine de la morale.

A. Landi a remis au patriarche Cyrille une parcelle de relique de saint Pantéléimon, transmise à l’Église orthodoxe russe par l’archevêque florentin Giuseppe Betori, ainsi qu’une parcelle de reliques des saints martyrs d’Aquilée. Le patriarche Cyrille de Moscou a accepté le reliquaire avec reconnaissance et assuré que les reliques seraient conservées avec la plus grande dévotion.

« Je suis profondément touché de ce présent, qui témoigne de la communauté de nos sources chrétiennes, de notre histoire commune, a dit le patriarche. Lorsque deux peuples vénèrent les mêmes saints, cela ne peut pas ne pas avoir de répercussions. Les martyrs d’Aquilée, le mégalomartyr Pantéléimon, saint Nicolas, dont les reliques reposent à Bari, sont autant de saints auxquels adressent leurs prières aussi bien les croyants italiens que les fidèles de l’Église orthodoxe russe ».

« L’histoire appartient au passé, qui nous parvient au travers des monuments et des manuscrits, a poursuivi le patriarche. Mais l’histoire vit d’une manière toute particulière dans l’Église, car elle y est actualisée : nous ne nous adressons pas aux saints martyrs comme à des gens ayant vécu dans le passé, nous ne les vénérons pas comme des héros ou des autorités des temps passés : ils sont vivants pour nous. Par leur vénération, l’histoire devient partie de notre vie. Ce phénomène n’est caractéristique que de l’Église, et nous croyons que cela se produit par la puissance de l’Esprit Saint ».

Le patriarche a ensuite rappelé les mots du pape Jean XXIII, selon lequel l’Église n’est pas un musée dans lequel sont conservés des objets importants pour la science, mais peu utiles pour la vie de tous les jours : dans l’Église, la tradition revit. Il ne s’agit pas tant, en effet, du souvenir des martyrs, ni de l’histoire chrétienne, mais des valeurs, en premier lieu des valeurs morales qui vivent dans l’Église. La parole de l’Église les fait parvenir à la conscience de l’homme moderne ».

Sa Sainteté a remarqué qu’à différentes périodes de l’histoire les valeurs morales avaient été confrontées à l’opposition de la société ou de personnes concrètes. « Aujourd’hui nous vivons cependant une époque particulière, où le mode de vie de nos contemporains est souvent un défi aux valeurs morales », a précisé le Primat de l’Église russe.

Il a évoqué l’opinion répandue dans différentes couches de la société, selon laquelle les valeurs morales appartiendraient au passé. C’est ainsi qu’il faut interpréter, suivant le patriarche, le sens de la plainte déposée contre l’Italie par Mme Lautsi, qui exigeait le retrait des crucifix de tous les établissements d’enseignement public. « Le peuple italien et les peuples d’autres pays européens qui ont soutenu l’Italie avec le peuple de Russie ont montré à toute l’Europe et au monde entier que les européens d’aujourd’hui ont besoin de la tradition chrétienne et que, lorsqu’il le faut, nous sommes prêt à défendre pacifiquement la présence de cette tradition dans la sphère publique », a souligné le Patriarche.

Le patriarche Cyrille a remercié A. Landi pour le livre L’Identité religieuse et culturelle de l’Europe. La question du crucifix, remarquant : « Il est très important que cet ouvrage soit traduit en langue russe. Je vais en attendre la traduction et j’espère que l’édition russe paraîtra avec une préface de l’Église, d’autant plus que l’Église orthodoxe russe a également pris une part certaine à l’examen de cette affaire devant la Cour européenne des droits de l’homme. »

Au cours de l’entretien, le patriarche Cyrille a souligné la sympathie mutuelle des peuples russe et italien. Les relations entre ces pays se développent entre autres dans le cadre du forum russo-italien de dialogue des sociétés civiles. Selon le patriarche, ce forum est promis à un grand avenir.

Le patriarche a mentionné l’année de la Russie en Italie et de l’Italie en Russie, et a dit espérer que les manifestations en cours contribuerait au développement des relations entre les deux pays.

Le Primat de l’Église orthodoxe russe a également abordé la question de la pastorale des migrants dépendant spirituellement du Patriarcat de Moscou, parmi lesquels des Russes, des Ukrainiens, des Moldaves et autres. Il a parlé du travail des paroisses situées dans différentes villes italiennes et a noté le nombre croissant de pèlerins venus des pays confiés à la responsabilité pastorale du Patriarcat de Moscou allant vénérer les reliques chrétiennes.

A l’issue de l’entretien, le patriarche Cyrille et l’ambassadeur d’Italie à Moscou ont procédé à un échange de cadeaux.